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02 mai 2007

2 mai 1940/Ouverture de la saison des Ballets russes

Éphéméride culturelle à rebours




    Le 2 mai 1940 est ouverte à Paris, au Théâtre de la Gaîté-Montparnasse, la saison des Ballets russes. Avec, à l’affiche, deux œuvres majeures de l’opéra russe : Boris Godounov de Modeste Moussorgsky et Eugène Onéguine de Piotr Ilitch Tchaïkovski (les compositeurs se sont tous deux inspiré d’Alexandre Pouchkine).



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Ilia Efimovitch Repine (1844-1930)
Portrait de Modeste Moussorgsky

Huile sur toile, 1881
Moscou, galerie Tretiakov
Source




BORIS GODOUNOV

    Le premier livret, Boris Godounov, reprend la tragédie historique du tsar du même nom, accusé d’avoir fait assassiner l’héritier légitime du trône. Le livret s’inspire de la chronique dramatique que Pouchkine a rédigée en vers en 1825. Alors que le poète est en exil. L’opéra éponyme, créé par Moussorgski, est donné pour la première fois à Saint-Pétersbourg en 1874.

    Cette œuvre, qui met en scène les épisodes sanglants de l’histoire de la Russie aux XVIe et XVIIe siècles (Boris Godounov a été tsar de 1598 à 1605), oppose au personnage individuel du tsar, le personnage collectif du peuple. À qui les événements, aidés par l’éveil de la conscience, donnent d’évoluer du statut de personnage passif et opprimé à l’état de force aveugle, guidée par la révolte.

    Cet opéra continue de symboliser, par-delà le temps et les révolutions, les troubles et les misères auxquels le peuple russe, perpétuellement bafoué, a été sans cesse assujetti. Elle constitue une œuvre phare dans l’histoire de ce pays en même temps qu’une œuvre historique sur le plan musical. Grâce notamment à l’un des plus grands interprètes de Boris, Chaliapine.


EUGÈNE ONÉGUINE

    Tout autre est l’œuvre de Tchaïkovski, composée de 1877 à 1878 et présentée pour la première fois à Moscou en mars 1879. Inspirée du roman le plus populaire de Pouchkine (1831 à 1834), cet opéra s’appuie sur une composition dramatique très mouvementée. Du moins sur le plan de l’expression des sentiments, portés ici à leur acmé. Une œuvre violente, aux accents pourtant essentiellement élégiaques. Qui met en scène un don Juan blasé, Eugène Onéguine, poursuivi par les requêtes de la belle Tatiana. Dont Tchaïkovski lui-même déclare être tombé amoureux.

    « Une âme pleine de beauté féminine et de pureté, qui n’a pas encore été souillée par le contact avec la vie réelle. »

    Un opéra vibrant des influences françaises de Gounod (en particulier son Faust ) et de l’art vocal italien.

Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli





Chaliapine


Voir/écouter :

- Féodor Chaliapine sur le site
dutchdivas.net où l'on peut entendre un court extrait de « La mort de Boris » (enregistrement « live » du 4 juillet 1928 à Covent Garden) ;
- Féodor Chaliapine sur le site
cantabile-subito : Once at eve [Gramophone, 1911] ;

- la soprano Galina Vichnievskaïa dans
l’air de Tatiana.
Enregistrement « live » d’Eugène Onéguine (octobre 1956 à Moscou). Source :
Abeille musique.


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30 avril 2007

30 avril 1902/Création de Pelléas et Mélisande de Debussy

Éphéméride culturelle à rebours




    Le 30 avril 1902, création à la salle Favart (Opéra-Comique) à Paris du drame lyrique Pelléas et Mélisande de Claude Debussy, sous la direction musicale d’André Messager et sur un livret de Maurice Maeterlinck. Avec la soprano américaine d’origine écossaise Mary Garden (1874-1967) [dans le rôle de Mélisande], Jean Périer [dans le rôle de Pelléas], Jeanne Gerville-Réache, Hector Dufranne et Félix Vieuille.





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    « Voici donc, âgée de vingt-huit ans [Mary Garden] avec les longs cheveux, qui plongent dans l’eau de la fontaine au deuxième acte et descendent jusqu’au seuil de la tour au troisième. Son physique, son phrasé et la couleur de sa voix […] contribuèrent au succès durable, sinon immédiat de l’ouvrage. Mary Garden avait fait ses débuts à l’Opéra-Comique deux ans plus tôt dans Louise de Gustave Charpentier et connut une carrière internationale, essentiellement américaine, dans des rôles aussi divers que Violetta (La Traviata, Giacomo Puccini), Carmen (Carmen, Georges Bizet), Tosca (Tosca, Giacomo Puccini) et Salomé (Salomé, Richard Strauss). » [Source Photo et légende : BnF].






    Deux jours auparavant, le 28 avril, la répétition générale de Pelléas a déclenché un gigantesque chahut, pour partie orchestré par Maurice Maeterlink lui-même, ulcéré que sa compagne, la cantatrice Georgette Leblanc (sœur de l’écrivain Maurice Leblanc), n’ait pas été choisie par Debussy pour le rôle principal. Quinze jours auparavant, dans un article du Figaro du 14 avril, Maeterlinck a publiquement renié l’œuvre. Parmi les défenseurs de l’opéra, on remarque Octave Mirbeau, Paul Valéry et Paul-Jean Toulet.






CLAUDE DEBUSSY

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Image, G.AdC



Voir aussi :
- (sur Terres de femmes)
22 mai 1911/Le Martyre de saint Sébastien de Debussy ;
- (sur Terres de femmes)
29 mai 1912/Création de L’Après-midi d’un faune ;
- (sur Terres de femmes)
21 mars 1914/Première audition de Trois poèmes de Stéphane Mallarmé de Debussy ;
- (sur Terres de femmes)
12 mars 1936/Maggie Teyte enregistre les Chansons de Bilitis de Debussy.

Pour entendre la voix de Mary Garden, se rendre sur le site
cantabile-subito.



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11 mars 2007

Alfredo Catalani/Ebben? Ne andrò lontana





    L'air "Ebbene?...N'andro lontana" de l'opéra La Wally d'Alfredo Catalani (1892), morceau de bravoure du film Diva (1980; à l'affiche le 11 mars 1981) de Jean-Jacques Beineix (dans lequel cet air était interprété par la soprano Wilhelmenia Wiggins Fernandez) contribua pour beaucoup au succès du film mais également à ce que lui soient attribués en 1982 le César de la Meilleure musique de film et le César du Meilleur premier film.





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    « Le succès de Diva est venu de ce que Beineix, le premier, a voulu moraliser l'héritage publicitaire en proposant une nouvelle ligne de partage entre l'invendable (l'âme, la création) et le prévendu (les objets, les clichés). »
Serge Daney, Libération, 21 novembre 1988.




« Ebben? Ne andrò lontana,
Come va l'eco della pia campana...
Là, fra la neve bianca !
Là, fra le nubi d'or !
Laddove la speranza, la speranza,
È rimpianto, è rimpianto, è dolor !
O della madre mia casa gioconda,
La Wally ne andrà da te, da te lontana assai,
E forse a te, e forse a te non farà mai più ritorno,
Ne più la rivedrai !
Mai più... mai più ...
Ne andrò sola e lontana
Come l'eco della pia campana,
Là, tra la neve bianca !
N'andrò, n'andrò sola e lontana...
E fra le nubi d'or !  »


« Eh bien, je m’en irai loin,
Aussi loin que l’écho de la pieuse cloche...
Là, à travers la neige blanche !
Là, à travers les nuages d’or !
Là où l’espoir
Est regret, est regret, est douleur !
O de de toi ma mère, maison joyeuse,
La Wally s'éloignera, très loin de toi,
Et peut-être, peut-être ne reviendra-t-elle jamais plus vers toi ,
Tu ne la reverras plus !
Jamais plus... jamais plus.
Je m’en irai seule et loin...
Aussi loin que l’écho de la pieuse cloche,
Là, à travers la neige blanche !
Je m’en irai, je m’en irai seule et loin...
Et à travers les nuages d’or ! »

La première représentation de La Wally de Catalani a eu lieu le 20 janvier 1892 au Théâtre de la Scala de Milan.





Voir/écouter aussi :
- le livret de
La Wally (Luigi Illica) ;
- la fiche sur
La Wally de Forum Opéra ;
- l'air de La Wally interprété par
Wilhelmenia Wiggins Fernandez ;
- (sur Google Video) un court extrait d'une
interview de Jean-Jacques Beineix.


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07 février 2007

7 février 1927/Naissance de Juliette Gréco

Éphéméride culturelle à rebours




    7 février 1927 : naissance (à Montpellier, Hérault) de Marie-Juliette Gréco, dite Juliette Gréco (d'origine corse par son père).




Juliette
Jolie môme
Image, G.AdC



   « Elle a des millions dans la gorge, des millions de poèmes qui ne sont pas encore écrits, dont on écrira quelques-uns.
On fait bien des pièces pour certains acteurs, pourquoi ne ferait-on pas des poèmes pour une voix ?…
Elle donne des regrets au prosateur, des remords. Le travailleur de la plume, qui trace sur le papier des signes ternes et noirs, finit par oublier que les mots ont une beauté sensuelle. La voix de Gréco le leur rappelle. Douce lumière chaude, elle les frôle en allumant leurs feux.
C’est grâce à elle, et pour voir mes mots devenir pierres précieuses, que j’ai écrit des chansons.
Il est vrai qu’elle ne les chante pas, mais il suffit, pour avoir droit à ma gratitude et à celle de tous, qu’elle chante les chansons des autres. »

Jean-Paul Sartre



Rue des Blancs-Manteaux

« Dans la rue des Blancs-Manteaux
Ils ont élevé des tréteaux
Et mis du son dans un seau
Et c'était un échafaud
Dans la rue des Blancs-Manteaux

Dans la rue des Blancs-Manteaux
Le bourreau s'est levé tôt
C'est qu'il avait du boulot
Faut qu'il coupe des généraux
Des évêques, des amiraux,
Dans la rue des Blancs-Manteaux

Dans la rue des Blancs-Manteaux
Sont v'nues des dames comme il faut
Avec de beaux affûtiaux
Mais la tête leur f'sait défaut
Elle avait roulé de son haut
La tête avec le chapeau
Dans le ruisseau des Blancs-Manteaux »


Paroles de Jean-Paul Sartre (Huis clos, 1944. Gallimard, Collection Folio, page 43). Musique de Joseph Kosma.



Note : cette chanson, écrite par Jean-Paul Sartre pour le personnage d'Inès dans Huis clos (1944), a été offerte par l'écrivain à Juliette Gréco au lendemain d'un dîner à la Cloche d'or (quartier Saint-Germain). Celle-ci, sur les conseils de Sartre, s'adresse à Joseph Kosma pour la musique. Elle l'interprétera pour son premier concert le 22 juin 1949 au Bœuf sur le Toit (rebaptisé L’œil de Bœuf pour sa réouverture), accompagnée par Jean Wiener. L'année suivante, le 4 juin 1950, Juliette Gréco remporte le Grand Prix de la Sacem pour son interprétation de « Je hais les dimanches » (paroles de Charles Aznavour; musique de Florence Véran).






Voir/écouter aussi :

- (sur Terres de femmes) 12 novembre 1946/
Juliette Gréco dans Victor ou les enfants au pouvoir ;
- (sur Terres de femmes) 8 mai 1947- 8 mai 1949/Miles Davis.
De Donna Lee à Juliette Gréco ;
- (sur Terres de femmes) 4 juin 1950/
Je hais les dimanches ;
- (sur le site de
RFI) une biographie de Juliette Gréco et un dossier spécial Gréco ;
- (dans les Archives pour tous de l'INA) les
archives Juliette Gréco.

- (sur YouTube) « Sous le ciel de Paris ». Ci-dessous :

Juliette Gréco, Sous le ciel de Paris

- (sur YouTube) « Déshabillez-moi ». Ci-dessous :

Juliette Gréco, Déshabillez-moi




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25 juillet 2006

Gianmaria Testa/Il viaggio

Topique : Voyage et récits de voyage
« Poésie d'un jour
(Pour faire défiler les poésies jour après jour,
cliquer sur les flèches de navigation)




Chiss_dove_il_fiume_incontra_il_mare
Ph, G.AdC




IL VIAGGIO

« Dentro l’acqua di questo torrente
Così limpida e veloce scenderò
Fino a quando la mia montagna
Fino a dove questa montagna
Si farà pianura
Molto lontano da questo cielo
Così vicino che lo puoi toccare
Fino al punto esatto
Fino al punto dove
Il fiume accarezza il mare

Ma chissà
Dove il fiume incontra il mare »

LE VOYAGE

« Dans l’eau fougueuse et limpide
De ce torrent je descendrai
Jusqu’à cet instant où ma montagne
Se fera plaine
Très loin de ce ciel si proche
Que tu le peux toucher
Jusqu’au point précis
Où le fleuve caresse la mer

Mais qui sait où le fleuve rencontre la mer ? »



Gianmaria Testa, Le voyage (première strophe et refrain). Disque La Valse d’un jour. Le chant du monde 874 1095. Distribution Harmonia Mundi.



Gianmaria Testa est ce « cantautore » et ancien chef de gare italien qui sait si pudiquement déshabiller l’âme et voyager en poète funambule sur le fil ténu de paysages choisis qui me portent.




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Voir aussi :
- le site des éditions Gianmaria Testa
sur lequel il est possible d'entendre cette chanson ;
- le
site officiel de Gianmaria Testa.



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23 juillet 2006

23 juillet 1966/Ouverture du 7e festival de jazz d’Antibes/Juan-les-Pins

Éphéméride culturelle à rebours




    Il y a quarante ans, le samedi 23 juillet 1966, était inauguré dans la pinède Gould le 7e festival de jazz d'Antibes/Juan-les-Pins. L’une des éditions les plus prestigieuses de ce festival mythique, créé en 1960 par Jacques Souplet et Jacques Hébey, en hommage à Sydney Bechet, mort l’année précédente, le 4 mai 1959.




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Image, G.AdC




    À l’affiche de ce 7e festival, l’orchestre de Duke Ellington et Ella Fitzgerald, les 26-29 juillet (cf. le film de Norman Granz : Duke et Ella à Antibes), et le Trio HLP (Jean-Luc Ponty au violon, Eddy Louiss à l’orgue et Daniel Humair à la batterie).

    Ella Fitzgerald était déjà venue deux ans auparavant à la 5e édition du festival (accompagnée par Tommy Flanagan au piano et Roy Eldridge à la trompette) et avait interprété, le 29 juillet 1964, « Mack the Knife », en duo improvisé avec les cigales de la pinède, un passage du concert passé à la légende sous le nom de « The Cricket Song ».

    Mais la grande révélation de ce 7e festival est le quartette du saxophoniste Charles Lloyd, avec Cecil McBee ou Ron McClure, mais surtout Keith Jarrett au piano et Jack DeJohnette à la batterie. Dès lors, Keith Jarrett est devenu l’une des véritables idoles du piano. Il est régulièrement revenu au festival auquel il a encore participé, cette année 2006, avec sa célèbre formation en trio (Gary Peacock à la basse et Jack DeJohnette) [ci-après => Inside Out].




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Duke Ellington & Ella Fitzgerald en juillet 1966
à l'aéroport de Nice

Ph. D.R.
Source





Ecouter aussi (Ella Fitzgerald/Duke Ellington au 7e festival d'Antibes-Juan-les-Pins de juillet 1966) :
-
It Don't Mean a Thing. La voix d'homme qu'on entend est celle de Duke, qui se joue du scat d'Ella ;
-
Lullaby of Birdland.
Source.

Ecouter/voir aussi (Ella Fitzgerald/Duke Ellington au 7e festival d'Antibes-Juan-les-Pins de juillet 1966) :

- (sur YouTube) Satin Doll. Ci-dessous :

 Ella Fitzgerald-Duke Ellington, Satin Doll

- (sur You Tube) I Want Something To Live For et Jazz Samba. Ci-dessous :

Ella Fitzgerald-Duke Ellington, I Want Something To Live For et Jazz Samba




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24 juin 2006

24 juin 1935/Mort de Carlos Gardel

Éphéméride culturelle à rebours




    Le 24 juin 1935, mort de Carlos Gardel (de son vrai nom Charles Gardes), près de Medellín (Colombie), dans un accident d’avion. D'après son [?] testament olographe *, il est né à Toulouse le 11 décembre 1890. Selon plusieurs sources, Carlos Gardel serait plutôt né à Tacuarembó (Uruguay), soit le 21 novembre 1881, soit le 11 décembre 1887.




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SOURCE




    Lorsque Carlos Gardel trouve la mort dans un accident d’avion, il est alors au sommet de sa gloire. Auteur-compositeur, Charles Gardel est aussi le plus célèbre interprète du « tango canciόn ». Par son talent, Carlos Gardel a largement contribué à faire du tango, l’une des plus belles danses au monde. Sa « voz azul » (« voix bleue ») chargée d’une émotion mélancolique a fait vibrer la terre entière, de l’Amérique du Sud à l’Europe en passant par les États-Unis. Mano a mano, La cumparsita, Me da pena confesarlo, Tomo y obligo, Volver figurent parmi les titres les plus connus. Sans oublier des films comme : Luces de Buenos Aires (Aldequi Millar, 1931), Melodía de Arrabal (Louis Gasnier, 1932), El tango en Broadway (Louis Gasnier, 1934), Tango Bar, son dernier film, tourné à New York en février 1935, avec pour partenaires Rosita Moreno et Tito Lusiardo (John Reinhardt, 1935).

    La chanson Volver (enregistrée par Carlos Gardel à New York le 19 mars 1935) a inspiré à Pedro Almodóvar le titre de son dernier film.



MANO A MANO

« Rechiflao en mi tristeza hoy te evoco y veo que has sido
en mi pobre vida paria sólo una buena mujer,
tu presencia de bacana puso calor en mi nido
fuiste buena, consecuente y yo sé que me has querido
como no quisiste a nadie, como no podrás querer.

Se dio el juego del remanye cuando vos, pobre percanta,
gambeteabas la pobreza en la casa de pensión,
hoy sos toda una bacana, la vida te ríe y canta,
los morlacos del otario los tirás a la marchanta
como juega el gato maula con el mísero ratón.

Hoy tenés el mate lleno de infelices ilusiones,
te engrupieron los otarios, las amigas, el gavión,
la milonga entre magnates con sus locas tentaciones
donde triunfan y claudican milongueras pretensiones,
se te ha entrado muy adentro, en el pobre corazón.

Nada debo agradecerte, mano a mano hemos quedado,
no me importa lo que has hecho, lo que hacés, ni lo que harás,
los favores recibidos creo habértelos pagado
y si alguna deuda chica sin querer se me ha olvidado
en la cuenta del otario que tenés se la cargás.

Mientras tanto que tus triunfos, pobres triunfos pasajeros
sean una larga fila de riquezas y placer,
que el bacán que te acamala tenga pesos duraderos,
que te abrás en las paradas con cafhisios milongueros
y que digan los muchachos: es una buena mujer.

Y mañana, cuando seas descolado mueble viejo
y no tengas esperanzas en el pobre corazón,
si precisás una ayuda, si te hace falta un consejo,
acordate de este amigo que ha de jugarse el pellejo
"pa" ayudarte en lo que pueda cuando llegue la ocasión.  »

Paroles de Celedonio Esteban Flores (1896-1947)
Musique de Carlos Gardel et de José Razzano
Composé en 1918 et enregistré par Carlos Gardel en 1923




MAIN DANS LA MAIN

« Perdu au fond de ma tristesse, je t'évoque sans cesse et me dis
Que dans ma sale vie de paria, une seule femme m'a aidé
Ta présence protectrice mit de la chaleur dans mon nid
Tu fus bonne, tendre, fidèle, et je sais que tu m'as chéri
Comme tu n'as aimé personne, comme tu n'aimeras plus jamais.

T'as peut-être pas oublié l'temps où tu n'étais qu'une midinette
Comptant trois sous pour faire un franc dans ta petite chambre meublée
Maintenant la vie te sourit, t'es devenue cocotte et coquette
A ton gros friqué amoureux tu sais soutirer les pépettes
Comme le chat rusé qui s'amuse avec le pauvre rat traqué.

Aujourd'hui ta coupe est pleine de malheureuses illusions
Les copines et les loulous ont bien monté ta jolie tête
Les milongas chez les richards avec leurs folles tentations
Où triomphent et vacillent les tangos de la prétention
Ont envahi ton pauvre coeur des relents de leur triste fête

Main dans la main nous cheminions, je n'ai pas à t'en remercier
Peu m'importe ce que tu fis ou ce que tu feras demain
Les faveurs que tu m'as accordées, je les ai chèrement payées
Mais s'il subsistait, par mégarde, une petite dette oubliée
Ajoute-la donc sur le compte du gros corniaud qui t'entretient

Aujourd'hui tous tes triomphes, pauvres triomphes éphémères
Défilent en une longue marche de plaisirs, richesses et succès
Le gros plein d'sous qui t'a louée a un compte en banque bien prospère
Les petits gars se disent entre eux ''ça, c'est vraiment une fille super''
Et tu t'pavannes dans les bals avec des beaux macs bien montés

Mais demain, quand tu ne s'ras plus qu'un vieux meuble bon pour la poubelle
Que l'espoir aura disparu dedans ton pauvre coeur blessé
Si tu avais besoin d'un conseil ou voulais quérir un peu d'aide
Rappelle-toi le vieil ami prêt à se saigner aux quatre veines
Pour t'aider comme il le pourra si l'occasion se présentait. »





Pour écouter Carlos Gardel :
- dans Mano a mano, se rendre sur la page
suivante (todotango.com) ;
- ou (mieux) cliquer
ICI pour voir une vidéo de Carlos Gardel chantant Mano a mano, court métrage filmé au début du parlant, en octobre/novembre 1930. Les guitaristes qui accompagnent Carlos Gardel sont Barbieri, Riverol et Aguilar (Source) ;
- écouter aussi Carlos Gardel dans
La Cumparsita (enregistrée à Barcelone le 17 décembre 1927) [Source] ou bien accéder (sur le site todotango) au répertoire alphabétique des chansons de Carlos Gardel [écoute en WMA].

Voir aussi :
- (sur le site Tango libre) les pages
Carlos Gardel ;
- (sur le site
Tacuarembó-Uruguay) les pages Carlos Gardel (une enquête autour de la véritable identité de Carlos Gardel) ;
- (sur Nuevo Ciclo) l'hommage de Cátulo Castillo (un des plus grands poètes du tango) à Carlos Gardel : "
Palabras para Carlos Gardel" ;
- (sur Terres de femmes)
Volver ;
- (sur Terres de femmes)
Horacio Ferrer/Je mourrai à Buenos-Aires.



* Dans l'ouvrage Carlos Gardel d'Edmundo Eichelbaum (Denoël, 1984), on trouvera bien (en hors-texte) une copie littérale d'un Acte de naissance (extrait du Registre d'état civil) de Charles Romuald Gardes, né à Toulouse le 11 décembre 1890. Mais d'aucuns contestent que Charles Romuald Gardes puisse être Carlos Gardel.



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06 mai 2006

6 mai 1978/Sortie chez Philips d’un coffret de 71 chansons de Serge Gainsbourg

Éphéméride culturelle à rebours





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Source



1978 : année Gainsbourg. À l’occasion des vingt ans de carrière de Serge Gainsbourg et des cinquante ans du chanteur (Serge Gainsbourg est né à Paris le 2 avril 1928), Philips publie le 6 mai 1978 un album regroupant soixante-et-onze de ses chansons (1958-1977).

Cette même année, le 11 juin très précisément, a lieu l’avant-première (dans l'émission Blue jeans 78) de ce qui deviendra le tube de l'été 1978 : « Sea, Sex and Sun ». Trois mois plus tard, Patrice Leconte adopte cette chanson « merdique » (selon le qualificatif de Gainsbourg) comme générique pour la bande son du film Les Bronzés.


« Sea, sex and sun
Le soleil au zénith
Vingt ans, dix-huit
Dix-sept ans à la limite
Je ressuscite
Sea, sex and sun
Toi petite
Tu es de la dynamite

Sea, sex and sun
Le soleil au zénith
Me surexcitent
Tes p'tits seins de Bakélite
Qui s'agitent
Sea, sex and sun
Toi petite
C'est sûr tu es un hit

Sea, sex and sun
Le soleil au zénith
Me surexcitent
Tes p'tits seins de Bakélite
Qui s'agitent
Sea, sex and sun
Toi petite
C'est sûr tu es un hit
Sea, sex and sun »



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25 avril 2006

Torquato Tasso/Di nettare amoroso

«  Poésie d'un jour »




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Aquatinte numérique originale, G.AdC



MADRIGAL

EN VOYANT S'ENTREBAISER DEUX DAMES


« Di nettare amoroso ebro la mente,
Rapto fui, né so come, in chiusa chiostra,
E due belle d’Amor guerriere in giostra
Vidi con l’arme ond’egli è si possente;

Vidi che in dolce arringo alteramente
Fer pria di lor beltà leggiarda mostra,
Poi movendosi incontra ove s’innostra
La bocca si ferir di bacio ardente.

Suonar le labbra e vi restaro i segni
De’ colpi impresi. Amor, deh, perché a voto
Tant’arme e tai percosse usar da scherzo ?

Provinsi in vera pugne e non si sdegni
Scontro l’amante. Amor, me, tuo devoto,
Opponi a l’una o fra le due fa terzo. »



« L’âme enivrée d’un nectar amoureux
Je fus ravi (mais comme ?) en close terre
Où joutaient deux d’Amour belles guerrières
Avec ces armes-là qui le font victorieux.

Dans cette double lice, et d’air altier,
Les vis d’abord se pavaner, badiner,
Puis, s’avançant, où la bouche carmine,
Se blesser toutes deux d’ardent baiser.

Leurs lèvres résonnèr’ et des fendants
Resta la marque. Ah, mais, Amour, pourquoi
User par jeu de ces plaies, de ces armes ?

Ne dédaignons un vrai combat d’amants !
Amour, moi, ton dévot, fais que je m’arme
Contre une d’ell’- ou les deux à la fois. »

Torquato Tasso, Rimes d’amour, Livre II (Pour Laura Peperata), n° 183, Fayard, 2002, p. 64-65. Traduction de Michel Orcel.



Le madrigal Di nettare amoroso a été mis en musique à cinq reprises entre 1582 et 1598, et notamment en 1587 (Madrigali a sei voci, IV, Vincenti) par le compositeur Luca Marenzio (v. 1553-1599). Penser à écouter l'extrait musical : Amor, i'ho tiré du Neuvième livre de madrigaux, 1599, et interprété par l'ensemble La Venexiana.





Voir aussi :
- (sur Terres de femmes) Le Tasse/
Comment l'amour vient aux bergers et bergères.



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18 avril 2006

18 avril 1958/L’inculpation d’Ezra Pound est levée

Éphéméride culturelle à rebours




Pound
Ph. D.R.




   Le 18 avril 1958, après treize années d'enfermement d’Ezra Pound dans l’hôpital psychiatrique St Elizabeths de Washington (où il avait été admis le 21 novembre 1945), l'inculpation de Pound pour haute trahison est levée par la Cour. Le 30 juin, Pound part pour l'Italie. Il déclare aux journalistes à son arrivée à Naples : « Toute l'Amérique est un asile de fous ».

    « Les photographes lui demandèrent de prendre la pose. Il s’exécuta en souriant, posa la main gauche sur sa hanche, et leva le bras droit pour faire le salut fasciste. » (Humphrey Carpenter, Ezra Pound, Belfond, 1992, page 920).

    Pound s’installe à Rapallo et reprend l’écriture de ses Cantos.



« I have tried to write Paradise

Do not move
   Let the wind speak
         that is paradise.

Let the Gods forgive what I
         have made.
Let those I love try to forgive
         what I have made. »



« Le Paradis, voilà quoi j’ai tenté d’écrire

Ne bougez point
    Laissez parler le vent :
            le paradis est là.

Que les Dieux pardonnent
            ce que j’ai fait
Que ceux que j’aime tentent de pardonner
            ce que j’ai fait.  »

Ezra Pound, Canto 120, Cantos, Flammarion, 1986, page 734.





LIRE, VOIR, ENTENDRE :

- « 
L’idéogramme universel » de Laurent Margantin (article paru dans La Quinzaine littéraire, numéro 826, mars 2002) ;
- Lien vers une
VIDEO d'1 min 14 où l'on peut entendre et voir Ezra Pound lisant le Canto LXXXI [Source : Annenberg/CPB Multimedia Collection] [format QuickTime] ;
- Lien vers une archive sonore où l'on peut
entendre Ezra Pound lire le Canto XLV [pour lire le Canto XLV, cliquer ICI] ;
- Cliquer également
ICI pour entendre Ezra Pound lire l'introduction du Canto I [Source] ;
- Ecouter aussi sur le site de la
BBC Four une interview d'Ezra Pound (21 avril 1958) ;
- Sur
Rai.it, interview de Giorgio Manganelli (en italien), qui resitue le poète Ezra Pound dans son contexte historique et social ;
- Sur
You Tube, écouter Pier Paolo Pasolini lire en italien le Canto LXXXI (traduction ci-dessous) [montage video sur bande son du film de Vanni Ronsisvalle tourné pendant l'automne 1967 pour la RAI, Une heure avec Ezra Pound [Un'ora con Ezra Pound]* (1968)].

* La
vidéo (en mauvais état) est aussi disponible sur YouTube, celle de la RAI n'étant plus (provisoirement ?) disponible.


Ci-après la traduction en français (par Denis Roche, Les Cantos, Le Livre de Poche, Collection Biblio, pp. 293-294) de l’extrait que l’on peut entendre dans les vidéos mentionnées ci-dessus (Canto LXXXI) :

« Maîtrise-toi, alors les autres te supporteront »
        Rabaisse ta vanité
Tu es un chien battu sous la grêle,
Une pie gonflée dans un soleil changeant,
Moitié noire moitié blanche
Et tu ne reconnais pas l’aile de la queue
Rabaisse ta vanité
            Que mesquines sont tes haines
Nourries dans l’erreur,
            Rabaisse ta vanité,
Prompt à détruire, sordide dans la charité,
Rabaisse ta vanité,
            Je dis rabaisse-la.


Mais d’avoir fait au lieu de ne pas faire
            Ce n’est pas là de la vanité
D’avoir, par décence, frappé à la porte
Pour qu’un Blunt ouvre
        D’avoir fait naître de l’air une tradition vivante
Ou d’un vieil œil malin la flamme insoumise
Ce n’est pas là de la vanité.
       Ici-bas toute l’erreur est de n’avoir rien accompli,
Toute l’erreur est, dans le doute, d’avoir tremblé. »


Voir aussi :
- (sur Terres de femmes)
Ezra Pound/« elle, comme un grand coquillage incurvé » ;
- (sur Terres de femmes)
1er novembre 1972/Mort d'Ezra Pound ;
- (sur Askesis)
Pound.



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28 mars 2006

28 mars 1941/Mort de Virginia Woolf

Éphéméride culturelle à rebours




    Le 28 mars 1941, Virginia Woolf met fin à ses jours en se noyant dans la rivière Ouse, près de sa maison de campagne de Monks House.




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Virginia Woolf
Image, G.AdC



    « Pour celle qui s’était fixé comme tâche "d’exprimer la vie, la mort, le folie" et de critiquer le système social en le montrant à l’œuvre dans toute son intensité, l’Angleterre encore victorienne, laminée par l’imminence de la Seconde Guerre mondiale, allait constituer un contexte historique dans lequel l’auteur du Journal et d’Une chambre à soi perdrait souvent le contact avec ses émotions.

    Intellectuelle à la beauté austère, à la malice fugitive, à la transparence opaque, Virginia Woolf fut authentique dans sa vie et dans ses relations humaines, comme dans l’intérieur de ses maisons, frais et civilisé.

    Aux prises avec la folie et ses demeures, seule, face à l’hostilité du monde et à la jungle de l’œuvre "rugissant d’innombrables paroles", elle ne cessera de s’opposer à la pétrification de la vie.

    Plus qu’une féministe avant la lettre, elle fut une femme aux vies multiples. Certaines n’ont voulu voir en elle qu’une bourgeoise mondaine, une socialiste militante, une redoutable pamphlétaire, un éditeur jaloux de ses contemporains.

    Ne fut-elle pas une lectrice attentive, "ordinaire", comme elle aimait à le rappeler, de Montaigne et de Conrad, de Poe, de Tolstoï ? Un esprit libre et cultivé ? Une révoltée qui conseillait de jeter sur le vieux monde "des brassées de feuilles mortes en flammes" ? Une romancière pour qui écrire était "le désespoir même" ? Une femme amoureuse, traversant son siècle comme Orlando, en accumulant les sensations, assoiffée de vie, de poésie ; opposant aux entraves de la mort les "allumettes inopinément frottées dans le noir des petits miracles quotidiens" ?

    […] Une femme chaleureuse, drôle, primesautière, passionnée, qui écrivait : "J’aime boire du champagne et devenir follement exaltée". Quant à son suicide, dans les eaux glacées de l’Ouse, les poches de sa veste lestées de pierres, ne signifiait-il pas qu’elle aimait par-dessus tout la vie ? »

Gérard de Cortanze, Magazine Littéraire, N° 275, mars 1990, p. 16.



    « Hypnotisée par la force du regard qu’il plongeait dans le sien, elle répéta :

    " Si nous étions tous les deux au sommet d’un rocher… " Être précipitée dans la mer, baignée, ballottée par les eaux, promenée parmi les racines du monde, cette idée la séduisait par son incohérence. Elle se leva d’un bond et se mit à aller et venir, bousculant, repoussant chaises et tables comme si vraiment elle se débattait au fond de l’eau. Il prenait plaisir à l’observer. Elle semblait se frayer un passage, écarter triomphalement les obstacles qui pouvaient entraver sa progression à travers l’existence […]
    Il la saisit au passage, la serra dans ses bras et ils commencèrent à se mesurer, s’imaginant au sommet d’un rocher, au-dessus d’une mer houleuse. Elle finit par se laisser vaincre et resta à terre, haletante et criant merci.
    "Je suis une ondine! Je sais nager, le jeu n’est pas fini!" reprit-elle ensuite. Sa robe était déchirée et, la paix étant rétablie, elle alla chercher une aiguille et du fil pour la raccommoder. »

Virginia Woolf, La Traversée des apparences, Livre de Poche, 1977, pp. 468-469.



    « Même moi, qui évoluais par moments dans un océan de joie, je n’aurais pu dire que cela : "Je ne désire rien de plus", ni imaginer rien qui pût être meilleur. J’avais seulement ce sentiment un peu superstitieux que les dieux, lorsqu’ils ont accordé le bonheur, le regrettent. Mais pas si vous l’avez atteint par des voies inattendues.  »

Virginia Woolf, Journal d'un écrivain, Editions 10/18, 2002, page 130.





Écouter/voir aussi :
- la voix de Virginia Woolf à l'adresse
suivante (document BBC Four du 29 avril 1937) ;
- (sur Terres de femmes)
25 janvier 1882/Naissance de Virginia Woolf;
- (sur Terres de femmes)
18 février 1927/Lettre de Vita Sackville-West à Virginia Woolf ;
- (sur Terres de femmes)
Virginia, lectures croisées ;
- (sur Terres de femmes)
21 septembre 1993/Orlando de Virginia Woolf, au Théâtre de L’Odéon ;
- (sur Terres de femmes)
La tentation du suicide.



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23 mars 2006

23 mars 2003/Hable con ella primé aux Oscars

Éphéméride culturelle à rebours




    23 mars 2003, Hable con ella (Parle avec elle) [2002] de Pedro Almodóvar primé aux Oscars d’Hollywood (Prix du Meilleur Scénario original).





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Affiche du film



Cucurrucucú Paloma

« Dicen que por las noches
no más se le iba en puro llorar,
dicen que no comía,
no más se le iba en puro tomar.
Juran que el mismo cielo
se estremecía al oír su llanto;
cómo sufrió por ella,
que hasta en su muerte la fue llamando

Ay, ay, ay, ay, ay,... cantaba,
ay, ay, ay, ay, ay,... gemia,
ay, ay, ay, ay, ay,... cantaba,
de pasión mortal... moría

Que una paloma triste
muy de mañana le va a cantar,
a la casita sola,
con sus puertitas de par en par,
juran que esa paloma
no es otra cosa más que su alma,
que todavia la espera
a que regrese la desdichada

Cucurrucucú... paloma,
cucurrucucú... no llores,
Las piedras jamás, paloma
¿qué van a saber de amores?
cucurrucucú... cucurrucucú...
cucurrucucú... paloma, ya no llores »

Paroles et musique de Tomàs Méndez Sosa






Pour écouter cette chanson interprétée par Caetano Veloso, cliquer
ici (Source)[format WMA] ou ici, ou encore ICI (extrait du film).
Pour plus d'extraits musicaux du film Hable con ella, cliquer
ICI.

Voir aussi :
- le
site officiel du film.



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16 mars 2006

16 mars 1960/Sortie d’À bout de souffle
de Jean-Luc Godard

Éphéméride culturelle à rebours




    Le 16 mars 1960, sortie sur les écrans parisiens d' À bout de souffle (1959) de Jean-Luc Godard, le film culte de La Nouvelle Vague.




Jean_seberg
Jean Seberg
Image, G.AdC




    Mars 1960. Quatre films de mémoire sur les écrans parisiens : Plein soleil de René Clément, Les Yeux sans visage de Franju, Soudain l’été dernier de Joseph Mankiewicz et À bout de souffle (1959), le premier long métrage de Jean-Luc Godard et le film culte de La Nouvelle Vague, sorti le 16 mars 1960 [tourné en un mois, du 17 août 1959 au 19 septembre 1959]. Avec François Truffaut comme scénariste et Claude Chabrol comme conseiller technique. Une musique de Martial Solal. Et le couple mythique Patricia Franchini (Jean Seberg [« Pourquoi ne portes-tu jamais de soutien-gorge ? », qui vient tout juste de jouer dans Bonjour tristesse d'Otto Preminger]) et Michel Poiccard (Jean-Paul Belmondo).



Un célèbre extrait du dialogue :

« [Michel] – Quelle impression ça te fait, Patricia, d’être dans une voiture volée ?
[Patricia] – Et toi, quand tu as tué le policier ?
[Michel] – J’ai eu peur.
[Patricia] – Mais comment la police a su que je vous connaissais ?
[Michel] – Un type a dû nous voir ensemble, et nous dénoncer.
[Patricia] – C’est très mal.
[Michel] – Quoi ?
[Patricia] – Dénoncer, je trouve que c’est très mal.
[Michel] – Non, c’est normal : les dénonciateurs dénoncent, les cambrioleurs cambriolent, les assassins assassinent, les amoureux s’aiment. Regarde, c’est beau la Concorde.
[Patricia] – Oui, c’est mystérieux toutes les lumières. »


Autre célèbre extrait :

« [Patricia] –Tu connais William Faulkner ?
[Michel] – Non..., qui est-ce ? Tu as couché avec lui ?
[Patricia] – Mais non, mon coco.
[Michel] – Alors je me fous de lui... Enlève ton Jersey.
[Patricia] – C'est un romancier que j'aime bien. Tu as lu Les Palmiers sauvages ?
[Michel] – Je te dis que non... Enlève ton chandail.
[Patricia] – Écoute. La dernière phrase, c'est très beau : "Between grief and nothing. I will take grief". Entre le chagrin et le néant, je choisis le chagrin... Et toi, tu choisirais quoi ?
[Michel] – [...] Le chagrin, c'est idiot. Je choisis le néant. C'est pas mieux, mais le chagrin, c'est un compromis. Faut tout ou rien. Puis maintenant, je le sais... »





Lire, voir et entendre :
-
scénario original du film [Lucien Poiccard s'est transformé par la suite en Michel Poiccard] ;
-
casting complet du film ;
- le site personnel
À bout de souffle ;
- la
fiche film du CNC/CRAC ;
- la
fiche film du Ciné-club de Caen, comportant un extrait sonore du film (NYHT = New York Herald Tribune) ;
- quelques photos du film en cliquant
ICI ;
- (sur IMDb) une
galerie-photo d'A bout de souffle ;
- courts extraits sonores sur la fiche-film
suivante.



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14 mars 2006

14 mars 1950/Édith Piaf fait sa rentrée salle Pleyel

Éphéméride culturelle à rebours




    Le 14 mars 1950, Édith Piaf, « le moineau de Paris », fait sa rentrée musicale salle Pleyel, à Paris, pour trois récitals.




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Édith Piaf
Image, G.AdC




    Édith Piaf chante « L’hymne à l’amour » composé en hommage à Marcel Cerdan (mort le 27 octobre 1949 dans un accident d’avion). Les paroles de cette chanson d’Édith Piaf ont été mises en musique par Marguerite Monnot.


« Le ciel bleu sur nous peut s'effondrer
Et la terre peut bien s'écrouler
Peu m'importe si tu m'aimes
Je me fous du monde entier
Tant qu'l'amour inond'ra mes matins
Tant que mon corps frémira sous tes mains
Peu m'importe les problèmes
Mon amour puisque tu m'aimes

J'irais jusqu'au bout du monde
Je me ferais teindre en blonde
Si tu me le demandais
J'irais décrocher la lune
J'irais voler la fortune
Si tu me le demandais

Je renierais ma patrie
Je renierais mes amis
Si tu me le demandais
On peut bien rire de moi
Je ferais n'importe quoi
Si tu me le demandais

Si un jour la vie t'arrache à moi
Si tu meurs que tu sois loin de moi
Peu m'importe si tu m'aimes
Car moi je mourrais aussi
Nous aurons pour nous l'éternité
Dans le bleu de toute l'immensité
Dans le ciel plus de problèmes
Mon amour crois-tu qu'on s'aime
Dieu réunit ceux qui s'aiment »





Pour écouter cette chanson, cliquer
ICI [format WMA] (Source).



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12 mars 2006

12 mars 1936/Maggie Teyte enregistre
les Chansons de Bilitis de Debussy

Éphéméride culturelle à rebours




    Il y a soixante-dix ans, le 12 mars 1936, enregistrement « historique » chez HMV (His Master’s Voice) des Fêtes galantes, des Trois Chansons de Bilitis et du Promenoir des deux amants de Claude Debussy par la soprano écossaise Maggie Teyte. Elle est accompagnée au piano par Alfred Cortot. Le disque reçoit un accueil triomphal du public.




Maggie_teyte_1
Label « NAXOS HISTORIQUES »
Coffret de 2 CD sorti le 07 juin 2004




    Grande voix du siècle, interprète spécialiste de Debussy et du répertoire de mélodies françaises (dont Henri Duparc), Maggie Teyte avait été choisie par le maître pour remplacer Mary Garden dans le rôle de Mélisande lors de la reprise de Pelléas et Mélisande le 12 mars 1908 à l’Opéra-Comique de Paris. « Elle ne chante pas seulement Mélisande, elle est Mélisande », disait Debussy. Née à Volverhampton le 17 avril 1888, Maggie Teyte est morte à Londres le 26 mai 1976.

    Le recueil de Pierre Louÿs (1870-1925), Trois Chansons de Bilitis (La flûte de Pan, La chevelure, Le tombeau des naïades), a été mis en musique par Debussy entre mai 1897 et mars 1898. Ci-après le poème « La chevelure » * :


« Il m'a dit: "Cette nuit, j'ai rêvé.
J'avais ta chevelure autour de mon cou.
J'avais tes cheveux comme un collier noir
Autour de ma nuque et sur ma poitrine.

Je les caressais, et c'étaient les miens;
Et nous étions liés pour toujours ainsi,
Par la même chevelure, la bouche sur la bouche,
Ainsi que deux lauriers n'ont souvent qu'une racine.

Et peu à peu, il m'a semblé.
Tant nos membres étaient confondus,
Que je devenais toi-même,
Ou que tu entrais en moi comme mon songe."

Quand il eut achevé,
Il mit doucement ses mains sur mes épaules,
Et il me regarda d'un regard si tendre,
Que je baissai les yeux avec un frisson. »




Pour en savoir plus sur Maggie Teyte, se reporter au site
cantabile-subito (en anglais). Il est possible d’y entendre la voix de Maggie Teyte, dans une mélodie de Henri Duparc (« Phidylé », Leconte de Lisle) :

« L'herbe est molle au sommeil sous les frais peupliers,
Aux pentes des sources moussues,
Qui dans les prés en fleur germant par mille issues,
Se perdent sous les noirs halliers. [...] »

accompagnée au piano par Gerald Moore
[un enregistrement de 4min 45s datant de 1940].

Ci-après
« L'Invitation au voyage » de Baudelaire, poème également mis en musique par Duparc et issu de la même séance d'enregistrement [Source].



* Un enregistrement de La chevelure est disponible sur la Toile. Dans une interprétation de Elly Ameling. [Source]



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31 janvier 2006

31 janvier 1952/Sidney Bechet à la Salle Pleyel

Éphéméride culturelle à rebours




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Image, G.AdC



Le 31 janvier 1952, concert mythique à la Salle Pleyel de Sidney Bechet avec l’orchestre de Claude Luter, qui interprètent et enregistrent ensemble (Vogue 520131) pour la première fois Petite Fleur. Le concert est organisé et présenté par Charles Delaunay.

Treize jours auparavant (le 18 janvier), Claude Luter et Sidney Bechet avaient enregistré pour Vogue Dans les rues d’Antibes. Le premier enregistrement de Petite Fleur (clip sonore) avait, lui, été réalisé (toujours pour Vogue, 520121) dix jours plus tôt, le 21 janvier à Paris, mais au sein de l’ensemble Sidney Bechet All Stars.

Comme l'écrit Frank Ténot dans le Dictionnaire du jazz (Robert Laffont, 1988), « Les Oignons (1949), Petite Fleur (1952), Dans les rues d’Antibes (1952) furent des succès de juke-box accessibles à tous les publics mais un peu éloignés de l’authenticité de la musique de ses débuts. Cependant, un grand souffle lyrique anime tous ses solos, chaleureux et pulpeux. Son large vibrato allait droit au cœur de l’auditoire, tandis qu’il savait mener d’un swing sans défaillance ses accompagnateurs français. »





Pour en savoir plus, voir le site officiel
Sidney Bechet.



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22 novembre 2005

Andrea Zanzotto/Filò, la Veillée

Topique : Venise




Casanova di Fellini



Alors qu’il travaille au doublage de son Casanova, tourné en anglais, Federico Fellini demande à Andrea Zanzotto s’il accepterait d’écrire un texte en dialecte vénitien pour l’ouverture du film.

Hommage à la Sérénissime, cette ouverture met en scène une cérémonie initiatique qu’engage le doge. Rituel marqué par l’apparition nocturne, devant les Vénitiens rassemblés, d’une déesse que les flots tenaient jusque-là engloutie (cf. Ezra Pound, Les Cantos, Ebauche de Cantos, XVII). A la fois mère et putain, cette « divinité lagunaire », cette chrysoprase surgie des flots, est offerte au désir des hommes qui feulent devant cette théogonie :


« Rèitiai s’ainàtei vebélei »


cri dédicatoire initial à la grande déesse vénitienne, Rèitia, guérisseuse et tisserande. Puis qui couvrent d’injures la promesse de femme encore émergente, au moment où sombre dans les abysses son visage qui se dérobe pour toujours à leur désir :


« Vulve fouteuse, cul foireux, baba catabà, vieille puante. » Aàh Strùssia


Cette « cérémonie… métaphore idéologique du film tout entier », Fellini attend de Zanzotto qu’il en compose, en un dialecte poétique rénové et vivifié, « plurivénitien » donc, une sorte de récitatif mimant le rituel, le cadençant, depuis la miraculeuse émergence de cette figure tutélaire, jusqu’à la disparition de cette « dragonne d’argent », de cette « bougresse de sorcière ». La première section qui forme le recueil est un « Récitatif vénitien ». Les hommes y scandent la mise hors de l’eau de ce « simulacre » de carton-pâte et leur chant se mue en huées à l’instant de l’effondrement et de l’engloutissement de la Poupée géante dans l’écume placentaire du Canal Grande. La place fondamentale accordée aux comptines et aux rengaines dicte au poète le choix du sizain et du décasyllabe. Chaque strophe se clôt sur une formule incantatoire lancée à la gloire de Venise/Vénus :


« Aàh Venessia/aàh Regina/aàh Venùsia ».


Les comptines, on les retrouve dans la Cantilène londonienne. Chanson fredonnée en « petèl », « la langue câline » par laquelle les mères bercent leurs tout-petits :


« Pin penin/valentin/pena bianca/mi quaranta/mi un mi dòi mi trèi mi quatro… »


Intitulée La Veillée/Filò comme le titre éponyme du recueil, la troisième section du livre est « un discours qui sert à faire passer le temps ». En réalité, un « discours second », une « méditation » née au cours de cet itinéraire étrange mené entre mythe et dialecte, qui puise largement dans le dialecte rustique haut Trévisan. Langue maternelle du poète, réhabilitée par la création poétique. Texte-manifeste de défense et illustration de la « dialectalité ».

Andrea Zanzotto, Filò, la Veillée, Éditions Comp'Act, 1995. Traduction de Philippe Di Meo.


Angèle Paoli
D.R. Texte angelepaoli



Imprécations à la reine

« Oci de bissa, de basilissa,
testa de fogo che’l giasso inpissa,
nu te preghemo : sbrega su fora,
ne te inploremo, tutto te inplora ;
mόstrite sora, vien su, vien su,
tiremo tutti insieme, ti e nu

aàh Venezia aàh Venissa aàh Venùsia

Occhi di biscia, di regina,
testa di fuoco che accende il ghiaccio,
noi ti preghiamo : erompi su, fuori,
noi t’imploriamo, tutto t’implora ;
mostrati sopra, sali, sali,
tiriamo tutti insieme, tu e noi

aàh Venezia aàh Venissa aàh Venùsia

« Yeux de couleuvre, de basilissa
tête de feu qui embrase la glace,
nous t’en prions : jaillis des flots, aller,
nous t’implorons, tout t’implore ;
montre-toi, élève-toi, élève-toi, toi et nous, tirons ensemble

aàh,Venise, aàh, Venissa, aàh, Venùsia »



Casanova_1





Ci-après, trois clips sonores du film Casanova :
-
aàh Venezia aàh Venissa aàh Venùsia
-
La poupée automate
-
Canto della Buranella
(Musique de Nino Rota. Copyright : C.A.M. S.r.l.\EUREKA s.a.s) [format RealPlayer]

Voir aussi un court extrait vidéo du film Casanova :




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08 novembre 2005

Kathleen Ferrier/Ewig… Ewig




Kathleen_ferrier
Portrait de Kathleen Ferrier.
Image, G.AdC




« Ewig … ewig , « éternellement ... éternellement », derniers mots de l’entrée dans l’éternité (sur les deux notes mi et ré) de Der Abschied (L’Adieu), dernier lied du Chant de la Terre (Das Lied von der Erde) de Gustav Mahler. Der Abscheid (L’Adieu) est un amalgame de deux poèmes tang de Mong Jao Yen (mort en 740) et de Wang Wei (699-759), adaptés en vers allemands par Hans Bethge (recueil Die chinesische Flöte, La Flûte chinoise). Mais les quatre derniers vers sont de la main de Mahler lui-même. Ci-après le final de Der Abscheid :

« Wohin ich geh'? Ich geh', ich wand're in die Berge.
Ich suche Ruhe für mein einsam Herz!
Ich wandle nach der Heimat, meiner Stätte.
Ich werde niemals in die Ferne schweifen.
Still ist mein Herz und harret seiner Stunde!
Die liebe Erde allüberall
Blüht auf im Lenz und grünt aufs neu!
Allüberall und ewig blauen licht die Fernen!
Ewig… Ewig... »

« Où vais-je ? Je vais errer dans les montagnes.
Je cherche le repos pour mon cœur solitaire.
Je chemine vers mon pays, vers ma demeure.
Je ne m’aventurerai pas au loin.
Calme est mon cœur, il aspire à son heure !
La terre bien aimée en tout lieu refleurit
au printemps et verdoie de nouveau.
Partout et pour toujours les horizons bleuissent !
Eternellement… éternellement. »

Traduction de Georges Gourdet


Lorsque Kathleen Ferrier chanta pour la première fois Le Chant de la Terre lors du premier festival d’Edimbourg (6-16 septembre 1947), elle était tellement bouleversée qu’elle ne parvint pas à chanter le dernier « ewig » de cette cantilène. Alors qu’elle venait de présenter ses excuses au chef d’orchestre (Bruno Walter) pour ce manquement non professionnel, celui-ci lui répondit tout aussitôt : « Si nous avions tous été aussi artistes que vous, nous aurions tous été en larmes comme vous ».





Écouter/voir aussi :
- (sur Terres de femmes)
22 avril 1912/Naissance de Kathleen Ferrier ;
- Plusieurs extraits de l'enregistrement historique (Vienne, 1952) de Der Abscheid sont accessibles sur la Toile, dont
l'intégrale du chant sur le site personnel suivant ;
- se rendre aussi sur le site
cantabile-subito pour entendre un air de Brahms (enregistrement live de Immer leiser wird mein Schlummer), chanté par Kathleen Ferrier au festival d'Edimbourg 1949 :
- (sur le site Ramifications) un dossier hommage à
Kathleen Ferrier, comprenant notamment une bibliographie et une discographie commentées.



Ferrier
CD audio (31 janvier 2003)
Tahra; ASIN : B00008AVBB


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04 octobre 2005

José Agustín Goytisolo/Palabras para Julia

«  Poésie d'un jour »




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Sur le chemin ne dis jamais :
Je n'en peux plus, je reste là.

Ph, G.AdC




PALABRAS PARA JULIA

« Tú no puedes volver atrás
porque la vida ya te empuja
como un aullido interminable.

Hija mía, es mejor vivir
con la alegría de los hombres,
que llorar ante el muro ciego.

Te sentirás acorralada
te sentirás perdida o sola
tal vez querrás no haber nacido.

Yo sé muy bien que te dirán
que la vida no tiene objeto,
que es un asunto desgraciado.

Entonces siempre acuérdate
de lo que un día yo escribí
pensando en ti como ahora pienso.

La vida es bella, ya verás
como a pesar de los pesares
tendrás amigos, tendrás amor.

Un hombre solo, una mujer
así tomados, de uno en uno
son como polvo, no son nada.

Pero yo cuando te hablo a ti,
cuando te escribo estas palabras,
pienso también en otros hombres.

Tu destino está en los demás,
tu futuro es tu propia vida,
tu dignidad es la de todos.

Otros esperan que resistas
que les ayude tu alegría
tu canción entre sus canciones.

Entonces siempre acuérdate
de lo que un día yo escribí
pensando en ti como ahora pienso.

Nunca te entregues ni te apartes
junto al camino, nunca digas
no puedo más y aquí me quedo.

La vida es bella, tú verás
como a pesar de los pesares,
tendrás amor, tendrás amigos.

Por lo demás no hay elección
y este mundo tal como es
será todo tu patrimonio.

Perdóname no sé decirte
nada más pero tú comprende
que yo aún estoy en el camino.

Y siempre siempre acuérdate
de lo que un día yo escribí
pensando en ti como ahora pienso. »

José Agustín Goytisolo, Palabras para Julia y otros poemas, colección Poesía, Editorial Plaza y Janés, Barcelona, 1999.



PAROLES POUR JULIE


« Tu ne peux plus t'en retourner,
Car la vie est là qui te pousse,
Comme une plainte interminable.

[...]

Tu te sentiras enfermée,
Tu te sentiras perdue, seule,
Ou tu voudras n'être pas née.

[...]

Mais toi, à jamais souviens-toi
De ce qu'un jour moi j'ai écrit
Pensant à toi comme j'y pense.

La vie est belle, tu verras
Comment, en dépit des chagrins,
Te viendront les amis, l'amour.

Un homme seul ou une femme,
Ainsi, regardés un par un,
Ils sont poussière, ils ne sont rien.

[...]

Alors toi, toujours souviens-toi
De ce qu'un jour moi j'ai écrit
Pensant à toi comme j'y pense.

D'autres attendent que tu résistes,
Que tu les aides de ta joie,
Et que les aide ta chanson.

Ne te livre, ni ne t'écarte,
Sur le chemin ne dis jamais :
Je n'en peux plus, je reste là.

[...]

Je ne sais rien dire de plus,
Mais tu dois comprendre ceci :
Je suis encore sur le chemin.

Mais toi, à jamais souviens-toi
De ce qu'un jour moi j'ai écrit
Pensant à toi comme j'y pense. »


Pour une bio-bibliographie du poète catalan José Agustín Goytisolo (1928-1999), cliquer ICI.



Ce poème de José Agustín Goytisolo est chanté par Paco Ibáñez dans son disque Universal 064 752-2, 2002. Ci-après la version de Paco Ibáñez :


« Tú no puedes volver atrás
porque la vida ya te empuja
con un aullido interminable,
interminable.


Te sentirás acorralada
te sentirás perdida o sola
tal vez querrás no haber nacido,
no haber nacido.


Pero tú siempre acuérdate
de lo que un día yo escribí
pensando en ti, pensando en ti,
como ahora pienso.


La vida es bella ya verás,
como a pesar de los pesares,
tendrás amigos, tendrás amor,
tendrás amigos.


Un hombre solo, una mujer,
así tomados de uno en uno,
son como polvo, no son nada,
no son nada.


Entonces siempre acuérdate
de lo que un día yo escribí
pensando en ti, pensando en ti,
como ahora pienso.


Nunca te entregues ni te apartes
junto al camino nunca digas
no puedo más y aquí me quedo,
y aquí me quedo.


La vida es bella ya verás,
como a pesar de los pesares,
tendrás amigos, tendrás amor,
tendrás amigos.


Y siempre siempre acuérdate
de lo que un día yo escribí
pensando en ti, pensando en ti,
como ahora pienso. »



- Pour entendre José Agustín Goytisolo dire à voix haute Palabras para Julia, cliquer ICI [RealPlayer]. Source 1. Source 2.
- Pour entendre Liliana Herrero chanter Palabras para Julia (José Agustín Goytisolo - Paco Ibáñez), cliquer ICI (thème musical du film Kamchatka de Marcelo Piñeyro, 2002) . Source



Liliana_herrero
Liliana Herrero



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28 septembre 2005

Paul Verlaine/Mon rêve familier

«  Poésie d'un jour »





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Ph, G.AdC





« Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime,
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.

Car elle me comprend, et mon coeur transparent
Pour elle seule, hélas! cesse d'être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.

Est-elle brune, blonde ou rousse? Je l'ignore.
Son nom? Je me souviens qu'il est doux et sonore,
Comme ceux des aimés que la vie exila.

Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues. »

Paul Verlaine, « Mon rêve familier », Poèmes saturniens.





- (sur Terres de femmes)
7 janvier 1896/Mort de Paul Verlaine ;
- (sur Terres de femmes)
10 octobre 1684/Naissance d’Antoine Watteau (Verlaine, Clair de lune, Fêtes galantes).



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27 juin 2005

27 juin 1945/Nomination de Reynaldo Hahn à la direction de l’Opéra de Paris

Éphéméride culturelle à rebours




    Nommé directeur de l’Opéra de Paris le 27 juin 1945, Reynaldo Hahn est compositeur et chef d’orchestre. Il a aussi été un ami très proche de Marcel Proust.



Reynaldo_hahn_1
Lucie Lambert,
Portrait de Reynaldo Hahn au piano, 1907.

Huile sur toile, Paris, BnF,
département des Arts du spectacle.
SOURCE




    D’origine vénézuélienne par sa mère - Elena Maria Echeneguacia - et d’origine juive par son père - Carlos Hahn -, Reynaldo Hahn est né à Caracas le 9 août 1874*. Lorsque, en 1894, il fait véritablement la connaissance de Marcel Proust, à Dieppe, dans le parc d'une amie commune, Madeleine Lemaire, Reynaldo Hahn a dix-neuf ans et, musicien très précoce, élève de Jules Massenet, il a déjà composé une œuvre musicale importante. Il est l’auteur d’un recueil de mélodies qu’il fera découvrir à Marcel. Dont il deviendra l’initiateur. Lui-même interprète des poèmes de Verlaine (Chansons grises) [1894] ou de Leconte de Lisle (Études latines) [1900] qu'il mit en musique, Reynaldo Hahn composa L’Île du rêve (1898) à l’occasion de ses débuts à l’Opéra-Comique.

    Reynaldo Hahn cherche dans la musique une adéquation avec ses propres sentiments (L'heure exquise) [Source audio]. Qui passent par les modulations charnelles, frêles et intimes de la voix. La trame musicale de sa musique de chambre s'apparente pour beaucoup à celle du compositeur Camille Saint-Saëns. Ses conceptions musicales s’opposent à celles de Proust pour qui « l’essence de la musique est de réveiller en nous ce fond mystérieux de notre âme, qui commence là où le fini et tous les arts qui ont pour objet le fini s’arrête aussi et qu’on peut appeler pour cela religieux ».

    Proust transposera sa grande passion pour Reynaldo dans Un amour de Swann. Sans jamais nommer son ami.

Angèle Paoli
D.R. Texte angèlepaoli



* « Sur la date exacte de cette naissance, il y a [...] matière à discussion. Beaucoup d'auteurs s'entendent encore à la situer le 9 août 1875. Daniel Bendahan, dans sa biographie, a pu publier l'extrait de naissance officiel du jeune Reynaldo, retrouvé à la paroisse d'Altagracia, à Caracas : c'est le 9 août 1874 que notre compositeur est venu au monde, même si ce n'est que le 8 mars 1876 qu'il recevra le baptême catholique, dans cette paroisse. Cette pièce d'état-civil est tout à fait incontestable, mais le livre de Bendahan n'ayant jamais été traduit en français, l'erreur se perpétue toujours. »

Jacques Depaulis, Reynaldo Hahn, Séguier-Atlantica, Collection Empreinte dirigée par Jean-Philippe Ségot, 2007, pp. 13-14.






Écouter aussi :
- sur la
page suivante des enregistrements historiques de la voix de Reynaldo Hahn, dont un document de 1909;
- en fin de note
Ceneri (Venezia 2001 - IX), "La barcheta" de Pietro Buratti, chanson vénitienne mise en musique en 1901 par Reynaldo Hahn, et notamment interprétée par le compositeur [enregistrement de 1922/23].


Voir aussi :
- un site dédié à
Reynaldo Hahn ;
- sur (Terres de femmes)
30 mai 1901/Récitation de « L’Offrande à la Nature » d’Anna de Noailles par Sarah Bernhardt.



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10 juin 2005

Le Tasse/Comment l'amour vient aux bergers et bergères

«  Poésie d'un jour »




Variation_sur_un_sofa__3
Aquatinte numérique originale, G.AdC,
d'après Bocca' Sofa du groupe de designers italiens Studio 65,
éd. Gulfram Italy, 1971
en hommage aux lèvres de Marilyn Monroe.




COME AMORE NASCE NEL PASTORE

« A l'ombra d'un bel faggio Silvia e Filli
Sedean un giorno, ed io con loro insieme,
Quando un'ape ingegnosa, che cogliendo
Sen' giva il mel per que' prati fioriti,
A le guancie di Fillide volando,
A le guancie vermiglie come rosa,
La morse e le rimorse avidamente :
Ch'a la similitudine ingannata
Forse un fior la credette. Allora Filli
Cominciò lamentarsi, impaziente
De l'acuta puntura :
Ma la mia bella Silvia disse : «  Taci,
Taci, non ti lagnar, Filli, perch’io
Con parole d’incanti leverotti
Il dolor de la picciola ferita.
[...]
Così dicendo, avvicinò le labra
De la sua bella e dolcissima bocca
A la guancia rimorsa, e con soave
Susurro mormorò non so che versi.
Oh mirabili effetti ! Sentì tosto
Cessar la doglia, o fosse la virtute
Di que’ magici detti, o, com’io credo,
La virtù de la bocca
Che sana ciò che tocca. »



« A l'ombre d'un beau hêtre étaient un jour assises
Phyllis et ma Sylvie, et j'étais avec elles,
Quand une ingénieuse abeille, qui allait
Parmi les fleurs des prés pour butiner son miel,
S'en vint en voletant sur les joues de Phyllis,
Sur les joues de Phyllis, vermeilles comme roses,
Et les piqua, les repiqua, avidement :
Car sans doute abusée par cette ressemblance,
Elle les prit pour une fleur. Phyllis alors
Commença de gémir, qui ne supportait pas
La cuisante piqûre;
Mais ma belle Sylvie lui dit : « Allons, tais-toi,
Tais-toi, ô, ma Phyllis, ne te lamente plus,
Car je sais la façon, par des mots enchantés,
D’enlever la douleur de ta petite plaie.
[…]
Tout en parlant de cette sorte, elle approcha
Les lèvres de sa belle et si suave bouche
Jusqu’à la joue piquée, et dans un doux murmure
Chuchota je ne sais quelle incantation.
Oh ! merveilleux effet ! Elle sentit bientôt
Que cessait la douleur, par la vertu peut-être
D’une telle formule, ou, comme je le crois,
Par la vertu de cette bouche
Qui guérit tout ce qu’elle touche. »

Torquato Tasso, Amyntas. Acte Ier, Scène II [Comment l’amour vient aux bergers]. Anthologie bilingue de la poésie italienne, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, pages 661-662.


    Aminta (Amyntas), pastorale dramatique en vers et en cinq actes, avec prologue et chœurs, du poète Torquato Tasso (Le Tasse, né en 1544 à Sorrente et mort à Rome en 1595), a été composée au printemps 1573 et représentée pour la première fois le 31 juillet de la même année à la cour de Ferrare, sur l'île de Belvédère, sur le Pô, « où les ducs de Ferrare aimaient à organiser des fêtes et dont le cadre champêtre s’harmonisait à merveille avec le sujet pastoral de la pièce ». Elle a été traduite en français pour la première fois en 1584 sous le titre de Fable bocagère.




Voir aussi :
- (sur Terres de femmes) Torquato Tasso/
Di nettare amoroso.



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11 mai 2005

11 mai 1950/Création de La Cantatrice chauve
de Ionesco

Éphéméride culturelleà rebours




Cantatrice_chauve




    Le 11 mai 1950, création au théâtre des Noctambules, à Paris, de la pièce d’Eugène Ionesco, La Cantatrice chauve, par la compagnie Nicolas Bataille. Mise en scène de Nicolas Bataille. Avec Claude Mansard dans le rôle de M. Smith et Paulette Frantz dans celui de Mme Smith. Depuis 1957, la pièce se joue sans interruption au Théâtre de la Huchette à Paris.


Voir aussi :
- sur le site ionesco.org la liste de toutes les éditions et représentations de la pièce
- (sur Terres de femmes) 22 janvier 1970/Le fauteuil d'Eugène Ionesco




Cantatrice_1



Sur le site ubu.com, on peut écouter Eugène Ionesco lui-même lire à voix haute le texte intégral de la pièce [serveur provisoirement indisponible] :
- Première partie
- Deuxième partie


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02 mai 2005

Edoardo Sanguineti/je t’explore, ma chair

«  Poésie d'un jour »




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aquatinte numérique originale de G.AdC



« ti esploro, mia carne, mio oro, che ti spio, mia cruda carta nuda, che ti seguo, che ti sogno, con i miei seri, severi semi neri, con i miei teoremi, i miei emblemi, che ti batto e ti sbatto, e ti ribatto, denso e duro, tra le tue fratte, con il mio oscuro, puro latte, con le mie lente vacche, tritamente, che ti accendo, se ti prendo, con i miei pampani di ruggine, mia fuliggine, che ti spiro, ti respiro, con le tue nebbie e trebbie, che il timbro con tutti i miei timpani, con le mie dita che ti amano, che ti arano, mia vita, mio avaro amore amaro:

io sono qui... »


« 
je t’explore, ma chair, mon or, mon corps, que je t’épie, mon papier nu et cru, que je te marque, que je te rêve, avec mes sérieux sévères sèmes noirs, avec mes théorèmes, et mes emblèmes, que je te batte en ébats et que je te rabatte, dense et dur, dans tes fourrés, avec mon lait obscur et pur, avec mes vaches lentes, comme on hache, que je t’allume, si je t’attrape, avec mes pampres rouillées, ma fumée, que je t’aspire et que je te respire, avec tes nuages et tes battages, moi qui te timbre de tous mes tympans, de mes doigts qui t’aiment et qui te labourent, avec mon crayon, qui te colore, qui te perfore et qui t’adore, ma vie, mon avare amour amer :

moi je suis là…»


Edoardo Sanguineti, L’ultima passeggiata (ommagio a Pascoli), 1982, Po&sie, numéro 109, 1975-2004, Trente ans de poésie italienne, Belin, p. 213. Traduction de Martin Rueff.





EDOARDO SANGUINETI

Edoardo_sanguineti
Source


Voir/écouter aussi :
- une bio-bibliographie d'Edoardo Sanguineti sur le site du
cipM (centre international de poésie Marseille). On peut aussi y entendre Edoardo Sanguineti (et non pas Sanguinetti) dire à voix haute un extrait de Postkarten (Éditions l’Âge d’Homme, 1985). Edoardo Sanguineti ["a toujours estimé que ses poèmes étaient destinés essentiellement à la fonction vocale"] ;
- (sur YouTube) une interview d’Edoardo Sanguineti (Source : Feltrinelli editore) ;
- (sur Terres de femmes) Edoardo Sanguineti/
Ballade des femmes.



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22 avril 2005

Pier Paolo Pasolini/A na fruta

«  Poésie d'un jour »




Pasolini_1
Pier Paolo Pasolini
Ph. D.R.
Source :
www.pasian.it/gassman



A NA FRUTA

« Lontàn, cu la to pièl
sblanciada da li rosis,
i ti sos una rosa
ch’a vif e a no fevela.

Ma quant che drenti al sen
ti nassarà na vòus
ti puartaràs sidina
encia tu la me cròus.

Sidina tal sulisu
dal solàr, ta li s-cialis,
ta la ciera dal ort,
tal pulvin da li stalis…

Sidina ta la ciasa
cu li peràulis strentis
tal cour romai pierdút
par un troi di silensi. »



POUR UNE PETITE FILLE

« Lointaine avec ta peau
Blanchie par les roses,
Tu es une rose qui vit et ne parle point.

Lorsqu’au fond de ta poitrine
Te naîtra une voix,
Muette, toi aussi,
Tu porteras ma croix.

Muette sur le dallage du grenier, sur les marches,
Sur la terre du potager,
Dans la poussière des étables…

Muette au foyer,
Avec des mots serrés
Dans ton cœur, désormais
Perdu dans un sentier de silence. »

Pier Paolo Pasolini, La Nouvelle Jeunesse, Poèmes à Casarsa (1941-1943) in Poèmes frioulans (1941-1974), Gallimard, Collection Du monde entier, 2003, p. 37. Traduction du frioulan par Philippe Di Meo.



LA NUOVA GIOVENTÙ


    Le recueil original, La Nuova Gioventù, La Nouvelle Jeunesse, publié en Italie quelques mois avant l’assassinat de Pasolini, constitue en ce sens un testament poétique. Boudé par la critique qui n’a pas pris la mesure de la foncière originalité poétique du recueil, celui-ci a été complètement passé sous silence à l’époque de sa parution. Recueil où Pasolini, déchiré et désabusé, fait le constat de la brisure de l'œuf orphique » :

    « L’éternel retour prend fin : l’humanité a pris la tangente. De nouveaux « démons » patronnent ce phénomène, et je crois encore, stupidement, à une révolution des pauvres. Le Livre demeure, mais la Parole s’en est allée. C’est le pire saint Paul qui avait raison et non l’Ecclésiaste. Le monde est une grande Eglise grise où il importe peu que les Devoirs soient imposés par l’Hédonè plutôt que par l’Agapè. Le futur tout entier n’est que la codification du développement par le compromis historique. »

Pier Paolo Pasolini, Quatrième de couverture du recueil (première édition italienne, 1975).



NOTICE BIO-BIBLIOGRAPHIQUE


    Né en 1922 à Bologne, Pier Paolo Pasolini passe une grande partie de sa jeunesse dans le Frioul (Casarsa) qu’il doit quitter en janvier 1950 à la suite d’un scandale sexuel. Pier Paolo s’installe alors à Rome avec sa mère et, de 1955 à 1961, se consacre surtout à l'écriture et publie deux romans (Ragazzi di vita [1955] et Una vita violente [1959]) qui lui valent une série de procès. En 1960, il signe son premier film, Accatone. Dès lors, il mène en parallèle une double activité de poète et de cinéaste iconoclaste, puisant sa « vitalité désespérée » dans le déchaînement même de la société italienne à son égard. Dans la nuit du 1er au 2 novembre 1975, il est assassiné sur la plage d'Ostie par un jeune prostitué de dix-sept ans (version officielle aujourd'hui remise en question).

    Nombreux et exceptionnels extraits d'archives sonores et vidéos sur le site pasolini de la Cinémathèque de Bologne, dont Pasolini lisant Caro ragazzo, la dernière séquence du film Medea [7 min 57], avec Maria Callas dans le rôle de Médée. Ou encore un sublime extrait vidéo [hélas provisoirement inaccessible, mais la vidéo [en très mauvais état] et la bande-son ont été reprises sur YouTube] du film de Vanni Ronsisvalle tourné pour la RAI, Une heure avec Ezra Pound (1968) où Pier Paolo interviewe Ezra Pound et lit l’un de ses poèmes (Canto LXXX). Film que j’ai pu voir dans sa version intégrale (70 min) à la Cinémathèque française le dimanche 2 mars 2003, à l'occasion d’une rétrospective Pasolini (Une vitalité désespérée).




Pasolini1
Source





PIER PAOLO PASOLINI

Pasolini
Source


Voir aussi :
- (sur Terres de femmes) 2 novembre 1975/
Mort de Pier Paolo Pasolini ;
- (sur Terres de femmes) Pier Paolo Pasolini/
El cuòr su l’aqua ;
- (sur Terres de femmes) Pier Paolo Pasolini/
Le chant des cloches ;
- (sur Terres de femmes)
Pier Paolo, le poète assassiné ;
- le
Centre Studi - Archivio Pier Paolo Pasolini (Bologne) ;
- (sur KaraArt)
« L'œuvre graphique de P.P. Pasolini », par Giuseppe Zigaina ;
- (sur KaraArt)
des tableaux de P.P. Pasolini.



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31 mars 2005

31 mars 1983/Mort de la chanteuse Suzy Solidor

Éphéméride culturelle à rebours




    Le 31 mars 1983 meurt à Cagnes-sur-Mer Suzanne Rocher, dite Suzy Solidor, chanteuse de cabaret, née à Saint-Servan (Ille-et-Vilaine) le 18 décembre 1900. Suzy Solidor est le symbole incarné de l’émancipation féminine des années trente.




Suzy_solidor
Suzy Solidor par Tamara de Lempicka, 1933
Huile sur panneau de bois, 46 x 37,5 cm
Château-Musée Grimaldi de Cagnes-sur-Mer (Alpes-Maritimes)
[Autre version]
D.R. Ph.




    Découverte par la célèbre antiquaire Yvonne de Bremond d’Ars, la blonde et sculpturale Suzanne Rocher défraie la chronique du « Tout Deauville » , station balnéaire qui fait fureur dans les années 1920. Les deux belles garçonnes forment pendant quelques années un couple très en vue, Faubourg Saint-Honoré.

    Devenue Suzy Solidor, la célèbre chanteuse fait ses débuts le 12 mai 1933 à « L’Européen », année où elle ouvre « La Vie parisienne », cabaret exclusivement féminin dans un premier temps. Outre des chansons de marin et du « grand large », L’Escale [format Windows Media Player, 30 s], Les Filles de Saint-Malo, Mon légionnaire, qu’elle interprète notamment en mars 1936 à L’Européen, aux côtés de Jeanne d’Orcy et de Réda Caire, Suzy Solidor chante des textes qui affirment ouvertement ses goûts et ses choix en matière de sexualité (« Ouvre » ).

    En 1942, en plein « Gross Paris », elle interprète Lily Marlène [format Windows Media Player, Source], chanson interprétée par Lale Andersen, puis Marlene Dietrich en 1941 *.

    Suzy Solidor a été immortalisée en « amazone » dans le portrait qu’a fait d’elle (ci-dessus) Tamara de Lempicka (1898-1980), peintre Art Déco la plus en vue de son époque. Récemment encore, les riches collections privées de Suzy Solidor ont fait l’objet de mises en vente aux enchères très prisées.



* « La radio de Belgrade adopta à l’été 1941 une rengaine sentimentale intitulée Das Mädchen unter der Lanterne, « La fille sous la lanterne », mieux connue sous le nom de « Lili Marleen ». Les vers dataient de la Grande Guerre. Goebbels tenta d’abord d’interdire la comptine jugée décadente, mais Rommel prît la liberté de la laisser diffuser. Eulalia Bunnenberg (connue sous les noms de Lale Andersen et même de Lili Marleen), puis Marlene Dietrich y acquirent une popularité inimaginable. On diffusa des versions en plus de douze langues, y compris le russe, l’estonien et le latin… Les Britanniques et les Américains n’étaient pas les moins enthousiastes. La chanson fétiche était diffusée en clôture d’émission – à 21 h 57 – et écoutée religieusement par la troupe dispersée du Cap Nord au Sahara. » (Source : Gabriel Vital-Durand)





Voir aussi :
- (sur le site de Paul Dubé) la
notice consacrée à Suzy Solidor (extraits musicaux) ;
- (sur Terres de femmes) une
biographie de Tamara de Lempicka et le Portrait réalisé par Guidu.



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Bernard Noël/L’Encre et l’Eau

«  Poésie d'un jour »




Nu_03_de_maristelle
Maristelle, Nu
Source



À Colette Deblé

« La lumière fait pousser des formes
un corps dans le papier
et pourtant rien
cette énigme va et vient
au bout des yeux

le temps n’est pas égal partout
ni sur toutes les peaux
celles que lave l’encre
retiennent une vie sans vie
l’attente close sur elle-même

une illusion lestée de réalité
ainsi sont faites les images
leur avenir est en nous
leur passé porte pourtant
le présent de leur apparition

le sens et l’instant mêlés
puis emballés dans une peau
voilà le secret des visages
l’âme y vient plus tard
comme une sueur de la mémoire

chaque nom est la prothèse
d’un espoir contre la déception
quelqu’un est là sans être là
il faut s’émouvoir du mystère
l’ombre s’y fait blanche

d’ailleurs les gestes les postures
plombent la ligne du temps
leur perpétuelle répétition
dédouble le passé au présent
l’un sur l’autre devenus transparents »

Bernard Noël, Les Yeux dans la couleur, P.O.L, 2004, page 143.





BERNARD NOËL

Bernard_nol_1
Source

Sur le site du CipM (Centre international de poésie Marseille), on peut entendre
Bernard Noël disant à haute voix un extrait de La Maladie de la chair : cette lecture a été effectuée le 18 novembre 1995. La Maladie de la chair, lue ici, est la version primitive de La Maladie de la chair, texte publié dans la collection Petite Bibliothèque des éditions Ombres en 1995.

Cf. Note de lecture dans la revue
Prétexte

Se reporter aussi aux
archives sonores du site de Radio France. Cliquer ICI ;

Voir aussi :
- (sur Terres de femmes) Bernard Noël/
Viens dis-tu ;
- (sur Terres de femmes) Bernard Noël/
La Langue d’Anna.



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26 mars 2005

Horacio Ferrer/Je mourrai à Buenos-Aires

«  Poésie d'un jour »




Tango
Image, G.AdC



BALADA PARA MI MUERTE

« Moriré en Buenos Aires, será de madrugada,
guardaré mansamente las cosas de vivir,
mi pequeña poesía de adioses y de balas,
mi tabaco, mi tango, mi puñado de esplín.

Me pondré por los hombros, de abrigo, toda el alba,
mi penúltimo whisky quedará sin beber,
llegará, tangamente, mi muerte enamorada,
yo estaré muerto, en punto, cuando sean las seis.

Hoy que Dios me deja de soñar,
a mi olvido iré por Santa Fe,
sé que en nuestra esquina vos ya estás
toda de tristeza, hasta los pies.
Abrazame fuerte que por dentro
me oigo muertes, viejas muertes,
agrediendo lo que amé.
Alma mía, vamos yendo,
llega el día, no llorés.

Moriré en Buenos Aires, será de madrugada,
que es la hora en que mueren los que saben morir.
Flotará en mi silencio la mufa perfumada
de aquel verso que nunca yo te supe decir.

Andaré tantas cuadras y allá en la plaza Francia,
como sombras fugadas de un cansado ballet,
repitiendo tu nombre por una calle blanca,
se me irán los recuerdos en puntitas de pie.

Moriré en Buenos Aires, será de madrugada,
guardaré mansamente las cosas de vivir,
mi pequeña poesía de adioses y de balas,
mi tabaco, mi tango, mi puñado de esplín.

Me pondré por los hombros, de abrigo, toda el alba,
mi penúltimo whisky quedará sin beber,
llegará, tangamente, mi muerte enamorada,
yo estaré muerto, en punto, cuando sean las seis,
cuando sean las seis, ¡cuando sean las seis! »

Texte de Horacio Ferrer



« Je mourrai à Buenos-Aires au moment de l’aurore
Je rangerai doucement les choses de la vie
Ma poésie en poussière d’adieu et de mitraille,
Mon tabac, mon tango et ma poignée de spleen

Je verrai la lumière entourer mes épaules,
Sur la table de l’ombre le vin s’effacera
Ma mort d’amour lente glissera languissante
Je serai morte à temps
Quand il sera 6 heures

Si Dieu ne rêve plus de moi vers mon oubli je marcherai
Toi tu m’attendras par Santa-Fé plein d’une tristesse désespérée
Ah ! serre-moi bien fort, tu sais, j’attends, j’entends la mort
La vieille mort blessant toujours et sans pitié
Viens mon âme on s’en va
Le jour monte ne pleure pas

Je mourrai à Buenos–Aires au moment de l’aurore.
C’est l’heure que préfèrent ceux qui savent mourir
Mon silence gardera le cafard brûlant
Du poème que jamais je ne pourrai te dire…

Je serai morte…
Quand il sera 6 heures… »

Traduction de Silvia Baron Supervielle.
Source : Susana Rinaldi. Buenos Aires… Paris, disque Barclay, 1979.





HORACIO FERRER

    Le poète Horacio Ferrer est le plus grand auteur vivant de la lyrique 'tanguera' du Rio de la Plata. Il est l'auteur de La Ultima Grela, de la Balada para un Loco et des vers de l'Opérita Maria de Buenos Aires (célèbre pour sa Fuga y misterio). Historien du tango, il préside, depuis sa création, l'Académie Nationale du Tango à Buenos Aires. L'Académie du Tango a récemment acquis, Avenida de Mayo, le Palais Carlos-Gardel, où se trouvent (dans les étages supérieurs du mythique Gran Cafe Tortoni) le Lycée National du tango (où sont formés les futurs chercheurs, artistes et aficionados du tango), le Conservatoire des Styles du tango Argentino Galvan et, récemment inauguré, le Musée International du tango.

    Balada para mi muerte a été mis en musique par Astor Piazzolla, l’alter ego musical d'Horacio Ferrer, avec qui il a notamment créé María de Buenos Aires. Balada para mi muerte a été tout dernièrement chanté (le 1er février dernier) par Teresa Berganza au Théâtre des Champs-Elysées à Paris en même temps que Chiquilín de Bachín.




Cafe_tortoni_buenos_aires





Pour entendre :
- Balada para mi muerte, cliquer ci-dessous :

Mina & A. Piazzolla, Balada para mi muerte, Live 1972.


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23 mars 2005

Barbara Strozzi/Lamento de L'Eraclito amoroso

«  Poésie d'un jour »




Barbara_strozzi_1
Bernardo Strozzi,
Joueuse de viole de gambe, vers 1635.

Huile sur toile, Gemäldegalerie, Dresde.
Portrait généralement considéré comme celui de Barbara Strozzi.
Source: Site Barbara Strozzi. LE site de référence.




« Udite amanti la cagione, oh Dio !
Ch'a lagrimar mi porta :
Nell’adorato e bello idolo mio,
Che si fido credei, la fede
è morta.

Vaghezza ho sol di piangere,
Mi pasco sol di lagrime
Il duolo è mia delizia
E son miei gioie i gemiti.
Ogni martire aggradami
Ogni dolor dilettami,
I singulti mi sanano,
I sospir mi consolano.

Ma se la fede negami
Quell’ incostante e perfido,
almen fede serbatemi
Sino alla morte,
O lagrime !
Ogni tristezza assalgami,

Ogni cordoglio eternisi,
Tanto ogni male affligami
Che m’uccida e sotterrimi. »




TRADUCTION :

«  Écoutez, amants, la raison, O Dieu !
Qui me pousse à pleurer :
La confiance que je portais
en mon bel amour tant adoré
Est morte.

Pleurer est mon seul passe-temps
Les larmes sont ma seule nourriture
Et la douleur, mon seul plaisir,
Et mes joies ne sont que soupirs.
Tout martyre me plaît
Toute douleur me divertit,
Me soigne
Les soupirs me consolent.

Mais sa fidélité mon inconstante et perfide amie
Dénigre la force de mon amour
Du moins servez-moi fidèlement
Jusqu’à la mort !
O larmes
Que la tristesse m’assaille.

Que la douleur soit éternelle
Que le mal m’afflige
Qu’elle me tue et m’enterre. »



    Le texte de ce lamento est repris d’un disque d'Arie, Cantate e Lamenti de Barbara Strozzi (disque cpo [Classic Produktion Osnabrück]. 999 533-2 Mona Spägele, soprano. Ensemble Incantato, juin 1998).

    Pour entendre ce lamento dans son intégralité (7 min 35'), cliquer ICI [RealPlayer]. On pourra entendre (toujours dans L'Eraclito amoroso) la voix d'Agnès Mellon, une très grande voix du baroque, dans un concert (proprement « miraculeux ») donné à Marcq-en-Baroeul (banlieue lilloise) le 24 janvier 2001, dans le cadre du 12e Festival Mozart de Lille.




BIOGRAPHIE

    Barbara Strozzi (Venise, 1619 - Padoue, 1677), fille de la courtisane Isabella Garzoni et du musicien Giulio Strozzi (1583-1652), constitue une belle exception musicale dans l’Italie du Seicento. Tout d’abord parce que, avec Francesca Caccini, elle est une des rares femmes compositrices (elle évoque à cet égard - dans le domaine pictural - Artemisia Gentileschi). Ensuite parce qu’elle a été d’une fécondité musicale exceptionnelle : en l’espace de vingt ans (1644-1664), elle a fait imprimer huit volumineux recueils de musique profane et sacrée. Cette composition du lamento de L’Eraclito amoroso s’inspire pour partie du modèle de la passacaille.





Voir aussi :
- (sur Terres de femmes)
Barbara Strozzi/Per un bacio che rubbai ;
- une
bio-discographie de Barbara Strozzi sur le site de la médiathèque.be ;
- (sur books.google.fr)
Les Femmes et la Création musicale: les compositrices européennes ... de Danielle Roster, Denise Modigliani, 1998.



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01 mars 2005

Antonella Anedda/Avant l’heure du dîner

«  Poésie d'un jour »




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Antonella Anedda
Image, G.AdC




PRIMA DI CENA

    « Prima di cena, prima che le lampade scaldino i letti e il fogliame degli alberi sia verde-buio e la notte deserta. Nel breve spazio del crepuscolo passano intere sconosciute stagioni; allora il cielo si carica di nubi, di correnti che sollevano ceppi e rovi. Contro i vetri della finestra batte l’ombra di una misteriosa bufera. L’acqua rovescia i cespugli, le bestie barcollano sulle foglie bagnate. L’ombra dei pini si abbatte sui pavimenti; l’acqua è gelata, di foresta. Il tempo sosta, dilegua. Di colpo, nella quiete solenne dei viali, nel vuoto delle fontane, nei padiglioni illuminati per tutta la notte, l'ospedale ha lo sfolgorio di una pietroburghese residenza invernale.

Ci sarà un incubo peggiore
socchiuso tra i fogli dei giorni
non sbatterà nessuna porta
e i chiodi piantati all’inizio della vita
si piegheranno appena.
Ci sarà un assassino disteso sul ballatoio
il viso tra le lenzuola, l’arma posata di lato.
Lentamente si schiuderà la cucina
senza fragore di vetri infranti
nel silenzio del pomeriggio invernale.
Non sarà l’amarezza, né il rancore, solo
- per un attimo - le stoviglie
si faranno immense di splendore marino.

Allora occorrerà avvicinarsi, forse salire
là dove il futuro si restringe
alla mensola fitta di vasi
all’aria rovesciata del cortile
al volo senza slargo dell’oca,
con la malinconia del pattinatore notturno
che a un tratto conosce
il verso del corpo e del ghiaccio
voltarsi appena,
andare. »

Antonella Anedda, « Prima di cena », Residenze invernale, Crocetti, Milano, 1992.



TRADUCTION

    « Avant l’heure du dîner, avant de passer la bassinoire à l’intérieur des lits, avant que le feuillage des arbres ne se vert-de-grise et que la nuit soit déserte. Dans le bref mitan du crépuscule défilent inconnues des saisons tout entières ; le ciel se couvre alors de nuages, le vent se lève et balaie souches et ronces. Contre les vitres de la fenêtre bat l’ombre d’une mystérieuse bourrasque. L’eau renverse les buissons, les bêtes trébuchent sur les feuilles détrempées. L’ombre des pins s’abat sur le dallage ; l’eau, de la forêt, est glacée. Le temps se fige, se dissout. Soudain, dans la tranquille solennité des avenues, dans le creux des fontaines, dans les pavillons illuminés tout au long de la nuit, l’hôpital a la clarté fulgurante d’une résidence d’hiver de Saint-Pétersbourg.

Il y aura un cauchemar bien pire
tapi entre les feuilles des jours
aucune porte ne claquera
les clous plantés à l’orée de la vie
se courberont à peine.
Il y aura un assassin étendu dans la coursive
le visage entre les draps, l’arme posée à côté.
Lentement s’entrouvrira la cuisine
sans fracas de vitres brisées
dans le silence de l’après-midi d’hiver.
Il n’y aura ni amertume ni rancœur, seulement
- un court instant - la vaisselle
débordera de splendeur marine.

Alors il faudra s’approcher, sans doute grimper
là où le futur se rétrécit
jusqu’à la table encombrée de vases
jusqu’à l’air chaviré de la cour
jusqu’au vol indéployé de l’oie,
avec la mélancolie du patineur nocturne
qui sait au bon moment aligner son corps avec la glace
se retourner à peine,
s’en aller. »

D.R. Traduction Angèle Paoli



BIO-BIBLIOGRAPHIE

    D’origine sarde et corse (par sa grand-mère), Antonella Anedda (Antonella Anedda-Angioy) est née en 1958 à Rome où elle a suivi des études d’histoire de l’art. Elle partage son temps entre la « Ville éternelle » et la Sardaigne, et enseigne actuellement le français à la Faculté des lettres et de philosophie de l'Université de Sienne/Arezzo. Elle écrit dans de nombreux périodiques et revues : Il Manifesto, Legendaria, Linea d’ombra, MicroMega, Nuovi Argomenti (éditions Mondadori), Poesia (éditions Crocetti).

    Antonella Anedda est l’auteure de quatre recueils de poésie :
- Residenze Invernali (Crocetti, Milan, 1992), pour lequel elle a reçu le prix Sinisgalli, le prix Diego Valeri et le Tratti Poetry Prize.
- Notti di pace occidentale (Donzelli, Rome, septembre 1999). Prix Montale 2000.
- Il catalogo della gioia (Donzelli, Rome, 2003).
- Dal balcone del corpo (Mondadori, Collection Lo specchio, Milan, juin 2007). Prix Napoli 2007.

    Elle a également publié trois recueils d’essais et nouvelles :
- Cosa sono gli anni (Fazi Editore, Rome, 1997).
- La luce delle cose (Feltrinelli, Milan, 2000).
- Tre stazioni (LietoColle, Faloppio, 2003).

    En tant que traductrice, elle a aussi publié une anthologie de poèmes de Philippe Jaccottet : Appunti per una semina : poesie e prose 1954-1994 (Fondazione Piazzolla, Rome, 1994), outre un recueil de variations poétiques et de poésies étrangères intitulé Nomi Distanti (Empiria, Rome, 1998).

    Tenue pour l’une des voix les plus originales de la poésie italienne contemporaine, Antonella Anedda est présente dans de très nombreuses anthologies italiennes et étrangères. Une traduction en français de ses poèmes a été confiée à Jean-Baptiste Para (directeur de la revue Europe) et devrait paraître d'ici peu en recueil. Certains des poèmes déjà traduits sont parus dans le n° 1 de la revue Confluences poétiques (Mercure de France, mars 2006), dans le n° 132 (décembre 2006) de la revue Décharge et dans le n° 20 (automne-hiver 2007) de la revue Rehauts.





Pour écouter la voix d’Antonella Anedda disant à voix haute le poème ci-dessus, cliquer
ICI. [Source : site berlinois lyrikline].

Voir aussi, sur Terres de femmes :
- Antonella Anedda/
février, nuit ;
- Antonella Anedda/
mars, nuit ;
- Antonella Anedda/
mai, nuit ;
- Antonella Anedda/
octobre, nuit ;
- 13 décembre ****/
Fête de sainte Lucie (décembre, nuit) ;
- Antonella Anedda/
Le dit de l’abandon ;
- Antonella Anedda/
S ;
- (dans la Galerie « Visages de femmes » de Terres de femmes)
Antonella Anedda (+ deux poèmes).


Voir encore :
-
les pages que le site
Italian Poetry a consacrées à Antonella Anedda ;
- (sur Niederngasse 16, janvier-mars 2006) un entretien (en italien) avec Antonella Anedda.




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28 février 2005

28 février 1912/Première exposition de Marie Laurencin

Éphéméride culturelle à rebours




    28 février 1912, première exposition de Marie Laurencin, à Paris, galerie Barbazanges.




Marie_laurencin
Marie Laurencin.
Image, G.AdC




MARIE

    Muse de Guillaume Apollinaire, Marie Laurencin (née le 31 octobre 1885 de père inconnu) a commencé de peindre dès 1902, bien avant sa rencontre avec le poète en 1907. Elle fréquente très tôt les habitués du Bateau-Lavoir. Peintres, poètes, critiques, amateurs d’art, marchands de tableaux. Parmi les plus célèbres d’entre eux, Vlaminck, Derain, Picasso, Braque, Matisse, Max Jacob, André Salmon, Gertrude et Léo Stein, Kahnweiler. Tous artistes d’avant-garde. Tout comme Guillaume Apollinaire dans le domaine de l’écriture. Un monde essentiellement masculin dans lequel Marie Laurencin parvient à trouver sa place. Et à charmer. Elle forme avec le poète d’Alcools, ardent défenseur de la peinture « cubiste » et de la « modernité », le couple légendaire du Montmartre d’avant-guerre.

    La peinture de Marie Laurencin, toute de poésie et d’élégance vaporeuse, s’attache davantage à la nuance qu’à l’expression. Marie Laurencin consacre son art à exécuter les portraits de ceux qui l’entourent. Essentiellement ses amis, parmi lesquels figurent Sonia et Robert Delaunay.

    À la mort de Guillaume Apollinaire, dont elle s’était séparée cette même année 1912, le chagrin de Marie Laurencin est immense. Le 8 juin 1956, elle meurt. Elle emporte dans sa tombe une lettre d’amour écrite par Guillaume Apollinaire : La Chanson du Mal-Aimé.



    Sur le site officiel Guillaume Apollinaire, le poème « Marie », un chant d'amour et de douleur, écrit en 1912 (peu après la rupture avec Marie Laurencin) et dit par Apollinaire le 24 décembre 1913 ("Archives de la parole").

« Vous y dansiez petite fille
Y danserez-vous mère-grand
C'est la maclotte qui sautille
Toutes les cloches sonneront
Quand donc reviendrez-vous Marie

Les masques sont silencieux
Et la musique est si lointaine
Qu'elle semble venir des cieux
Oui je veux vous aimer mais vous aimer à peine
Et mon mal est délicieux

Les brebis s'en vont dans la neige
Flocons de laine et ceux d'argent
Des soldats passent et que n'ai-je
Un cœur à moi ce cœur changeant
Changeant et puis encor que sais-je

Sais-je où s'en iront tes cheveux
Crépus comme mer qui moutonne
Sais-je où s'en iront tes cheveux
Et tes mains feuilles de l'automne
Que jonchent aussi nos aveux

Je passais au bord de la Seine
Un livre ancien sous le bras
Le fleuve est pareil à ma peine
Il s'écoule et ne tarit pas
Quand donc finira la semaine »


Guillaume Apollinaire, « Marie », Alcools, Gallimard, Collection Poésie, page 55.



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04 février 2005

4 février 1969/Récital de Barbara à l'Olympia

Éphéméride culturelle à rebours




Barbara
Portrait de Barbara.
Image, G.AdC



« À l'heure de sa dernière heure
Après bien des années d'errance
Il me revenait en plein coeur
Son cri déchirait le silence
Depuis qu'il s'en était allé
Longtemps je l'avais espéré
Ce vagabond, ce disparu
Voilà qu'il m'était revenu »

Barbara, « Nantes ».




Barbara_il_tait_un_piano_noir_1
Barbara, Il était un piano noir : Mémoires interrompus,
Fayard, 1998.
ISBN : 2213602743





    Le 4 février 1969, Barbara (9 juin 1930 - 24 novembre 1997) entame un récital à l'Olympia pour deux semaines (jusqu’au 17 février). Elle est accompagnée par Roland Romanelli à l'accordéon, Michel Gaudry à la contrebasse, Michel Portal au saxophone, Michel Sanvoisin à la flûte à bec. Elle interprète trente chansons dont quinze nouveaux titres, extraits de l'album Le soleil noir, paru l’année précédente.

    En première partie du récital, Barbara interprète des chansons du répertoire « début-de-siècle » : « Sur la place », « La complainte des filles de joie », « Veuve de guerre », « Les amis de Monsieur », « Elle vendait des petits gâteaux », « Le grand frisé ».
Dans la deuxième partie, elle interprète ses propres compositions, Georges Moustaki la rejoignant chaque soir sur scène pour chanter en duo « La dame brune ».
Parmi ses chansons : « Gare de Lyon », « Gueule de nuit », « Au bois de Saint-Amand », « L'amoureuse », « La solitude », « Göttingen », « Le soleil noir », « Pierre », « Mes hommes », « Nantes », « Une petite cantate », « Ce matin-là ».

    De ce récital à l’Olympia, un double album 33 tours sera réalisé, qui sortira le 11 mars 1969.


    Ci-dessous « Göttingen » :

« Bien sûr, ce n'est pas la Seine,
Ce n'est pas le bois de Vincennes,
Mais c'est bien joli, tout de même,
A Göttingen, à Göttingen,

Pas de quais et pas de rengaines,
Qui se lamentent et qui se traînent,
Mais l'amour y fleurit quand même,
A Göttingen, à Göttingen,

Ils savent mieux que nous, je pense,
L'histoire de nos rois de France,
Hermann, Peter, Helga et Hans,
A Göttingen,

Et que personne ne s'offense,
Mais les contes de notre enfance,
« Il était une fois », commencent,
A Göttingen

Bien sûr, nous, nous avons la Seine,
Et puis notre bois de Vincennes,
Mais, Dieu, que les roses sont belles,
A Göttingen, à Göttingen,

Nous, nous avons nos matins blêmes,
Et l'âme grise de Verlaine,
Eux, c'est la mélancolie même,
A Göttingen, à Göttingen,

Quand ils ne savent rien nous dire,
Ils restent là, à nous sourire,
Mais nous les comprenons quand même,
Les enfants blonds de Göttingen,

Et tant pis pour ceux qui s'étonnent,
Et que les autres me pardonnent,
Mais les enfants, ce sont les mêmes,
A Paris ou à Göttingen,

O, faites que jamais ne revienne,
Le temps du sang et de la haine,
Car il y a des gens que j'aime,
A Göttingen, à Göttingen,

Et lorsque sonnerait l'alarme,
S'il fallait reprendre les armes,
Mon coeur verserait une larme,
Pour Göttingen, pour Göttingen... »

Paroles et musique de Barbara.



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15 décembre 2004

Louise Labé/Tant que mes yeux pourront larmes épandre…




Louise_lab




Sonnet XIV de Louise Labé

« Tant que mes yeux pourront larmes épandre
A l’heur passé avec toi regretter,
Et qu’aux sanglots et soupirs résister
Pourra ma voix, et un peu faire entendre 

Tant que ma main pourra les cordes tendre
Du mignard luth, pour tes grâces chanter ;
Tant que l’esprit se voudra contenter
De ne vouloir rien fors que toi comprendre,

Je ne souhaite encore point mourir.
Mais, quand mes yeux je sentirai tarir,
Ma voix cassée, et ma main impuissante,

Et mon esprit en ce mortel séjour
Ne pouvant plus montrer signe d’amante,
Prierai la mort noircir mon plus clair jour. »



Louise Labé, Œuvres poétiques, Poésie/Gallimard, édition présentée, établie et annotée par Françoise Charpentier, novembre 2001, page 122.




Voir/lire/écouter :
- ce poème sur le site
Archivox (où a été aussi enregistré le poème « Je vis, je meurs » de Louise Labé) ou cliquer ICI ;
- (sur Terres de femmes) le
Sonnet II : « Ô beaus yeus bruns, ô regars destournez […] » dans la galerie Visages de femmes;
- (sur Vive voix) le Sonnet VII : « Je vis, je meurs », dit par Maria Casarès ;
- (sur Terres de femmes)
Louise Labé, une carte à jouer ? (fiche de lecture sur l'ouvrage de Mireille Huchon : Louise Labé, Une créature de papier, Librairie Droz, 2006).



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12 décembre 2004

A summo celo, par l'ensemble vocal féminin Kantika




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Emmanuelle Thomas (soprano de l'ensemble vocal Kantika
et fille aînée d'Angèle Paoli)

Image, G.AdC




    Cette messe des Quatre-Temps de l'Avent, où alternent tour à tour chants grégoriens et polyphonies de Saint-Martial de Limoges (XIe et XIIe siècles), est ici interprétée a cappella par l'ensemble vocal féminin Kantika, sous la direction de Kristin Hoefener.

    L'équilibre très réussi entre l’homogénéité sonore de l'ensemble et l’expression très typée de chacune des voix contribue pour beaucoup au caractère à la fois recueilli et débordant d'émotion de cette interprétation. Véritablement « unique ». Pour s’en convaincre, il suffit d’entendre la manière parfaite avec laquelle les ornements des chants grégoriens s’intègrent dans chacune des phrases musicales. Sans jamais perdre leur naturel.


    Il est possible d’entendre quelques extraits de ce disque admirable sur le tout nouveau site (en cours de création) de l'ensemble Kantika ou sur le site de la Fnac.




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    Ci-après un article de la revue Diapason sur le disque A summo celo de l'ensemble KANTIKA

    Attention, expérience extrême. Les chantres féminins de Kantika proposent ce qui peut se faire de plus déroutant dans l'exploration actuelle du chant ecclésiastique du haut Moyen Age. Une fois annoncé un contexte rassurant car bien connu (le répertoire de Saint-Martial de Limoges), cette réalisation n'est que prise de risques assumée avec une maîtrise et une intelligence rarement en défaut.

    Ensembles homogènes, interventions solistes très typés (jusqu'à donner l'impression de suivre individuellement chaque voix au fil de l'office), timbres naturels combinés aux plus fines sophistications (le dosage du vibrato ornemental est bluffant) : Kantika s'impose d'abord par la palette de ses possibilités. Au même niveau se situe l'aisance avec laquelle le groupe investit les techniques cantorales ancestrales. Leur déchant est aussi agile que leur ornementation est souple, alors que les "tempos" sont toujours distincts depuis les premières pièces de la messe – presque allantes – jusqu'au ton adopté pour le Sanctus, solennel portique d'entrée de la prière eucharistique.

    L'écoute attentive du programme vire alors à l'inédit. Dans une acoustique et une prise de son favorisant de séduisantes résonances, il devient impossible de décrocher de ce kyrie dont les duplications tropées accusent la forme litanique, de cette interminable hymne dont les strophes forment autant de reflets particuliers d'une totalité unifiée. Ponctuellement, l'auditeur se sentira peut-être exclu d'une telle démarche : comme enivré de lui-même, le chant de Kantika n'évite pas le narcissisme hermétique. Et la multiplication des bourdons vocaux ou l'emploi de techniques propres aux vocalités de tradition orale peuvent dérouter longuement, tant les clichés moyenâgeux volent en éclat au contact de cette recréation. Certains choisiront de rester sur le bord de la route. D'autres suivront Kantika avec bonheur, sur un itinéraire aussi secouant qu'enthousiasmant.

Xavier BISARO



L'ensemble Kantika est soutenu par la France_telecom_2 Fondation France Telecom



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