<<Poésie d'un jour
"les canettes de 8.6 qui m’avaient servi de traversin"
5 (extrait)
aguicheur
rien que pour moi
je me racontais des voyages qui n’arriveraient pas
tapais d’énormes bandelettes
sur les seins en terre rouge
du terrain vague
j’étais libre des bras des autres
j’avais tout
passé des années à grandir sur des maps vides
addict au crépitement de tout ce qui ne se touche pas
avec la peau
je traçais
sur les platanes une marque au velleda
mesurais ma croissance
et comptais
en barrettes verticales
les canettes de 8.6
qui m’avaient servi de traversin
au moment de m’endormir
bref j’avais tout
alors pourquoi
à suivre la nuit dans le dos
comme d’hab’
à libérer avec les pieds
les cailloux prisonniers du bitume
à shooter dans des balles de pollen
je projette ma vue tranquille
l’œsophage du boulevard
je le traverse chaque nuit
comme un pèlerinage
alors pourquoi d’un coup
la rue s’évanouit s’annule se dissipe
ouvre ses membres et ses entailles en grand
me visse sur une dernière parcelle de dur
un îlot pour le déluge
Rémi Letourneur, L’odeur du graillon, Préface de Bruno Berchoud, Cheyne Éditeur 2025, pp.51,52.
Né en 1992, Rémi Letourneur a passé son enfance dans un quartier populaire de Toulon avant de s’installer à Bordeaux pour ses études. Au terme d’une double formation en Sciences politiques et en Histoire, il se consacre aujourd’hui à une thèse de doctorat. Il publie des poèmes en revues depuis 2022 et est co-fondateur du collectif de poésie Pour le Moment, à Bordeaux. L’Odeur du graillon est son premier livre. Il écrit également des nouvelles et collabore à ce titre avec la revue Zone critique.













































































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