<< Poésie d'un jour
L’été silencieux nous mène sur l’ocre des chemins. Il arrive que le
bleu des cimes, le bleu qui nous tient à distance dévoile un sommet
que demain ravira. Plus souvent on se tient à la plaine qui ouvre
ses sillons au pied des oliviers, passé l’ombre de chênes aux feuilles
bruissantes. Le miracle c’est la source tout près surprise, un lézard
fuyant le sentier sous le pied du marcheur. Tout cesse quand le vent
se lève : sa voix précède au-dessus de nos têtes l’ondulation des
branches où le revers plus clair des feuilles soudain apparaît.
Le fer de l’olivier tient le soleil captif
Dans la terre esseulée sa racine saigne et croît
Quelle ombre le nourrit puis l’offense ?
Nous avons suivi le chemin sans regarder le ciel. L’aimante écorce
nous a déroutés dans la poussière blanche et nous congédie.
Son poids sur notre épaule est un cadeau du vent.
Le vent s’agite come chevesne en nasse
Les feuilles des érables devenues cassantes étouffent les chemins
Le monde sous nos pieds est poussière vénéneuse
Dans la lumière le blé cuit
Les veines sont de goudron liquide
L’éteule aligne ses cours tranchés que le grain répandu une fois
[encore désaltère
L’ogre de l’été est assis dans le jour
Emmanuel Damon, « L’Eté pour des millions d’années » in L’ombre parlée, Monotypes et photographies de Joël Leick, Al Manar 2025,pp.25, 26, 27.
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EMMANUEL DAMON
Source
■ Emmanuel Damon
sur Terres de femmes ▼
→« VI. Un millier de lames neuves », in Au seuil d’un règne de vin noir, Al Manar, 2016, pp. 74-75. Encres de Catherine Bolle
→ [Fourmille dans notre sang ce tissu de mer] (poème extrait d’Au seuil d’un règne de vin noir)
→ Regain du sang, Éditions Al Manar | Alain Gorius, Collection Poésie, 2012
■ Voir aussi ▼
→ (sur le site des éditions Al Manar | Alain Gorius) une page sur Regain du sang d’Emmanuel Damon
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